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  • Belgique - La Wallonie, un condensé de traditions et de saveurs

    Mons — Les Belges aiment la fête et le folklore. Plusieurs manifestations sont d’ailleurs inscrites au patrimoine oral et immatériel de l’humanité par l’UNESCO, comme la Ducasse (ou Doudou) de Mons, en Wallonie. Et ce sont autant d’occasions d’en découvrir les rites et la gastronomie locale. De Tournai à Bruxelles, via Mons et Namur, place au plaisir des sens.à Richmond et Petersburg, via le film Lincoln. Article publié dans le Devoir du 27 octobre 2012 Six robustes chevaux de trait, aidés par des centaines de Montois qui poussent à l’arrière, tirent le Car d’or. Pas question de ralentir l’impulsion. Et encore moins de s’arrêter. La montée du Car, qui dure une vingtaine de secondes, est saluée par le son de trompettes tibétaines. Dieu soit loué ! Malgré «drache» et dalle humide, le Car d’or réussit à gravir d’une seule traite le raidillon pavé qui longe la collégiale Sainte-Waudru. Bien, sans quoi le malheur risquait de s’abattre sur Mons durant l’année. «Les Montois ne périront pas», scande la foule enthousiaste. Légende ou pas, les Montois ont souvenir d’une année de «Doudou» où le fameux char doré de style Louis XVI, portant la châsse de Sainte-Waudru, n’a pas grimpé la côte d’un seul élan. C’était en 1914, deux mois avant la bataille de Mons. «De quoi mordre sur sa chique!» L’origine de la Ducasse (fête patronale) de Mons ? Sainte-Waudru. Nous sommes au VIIe siècle. Après avoir élevé ses quatre enfants, Waudru décide de changer sa vie et de se consacrer à Dieu. Elle se retire sur une colline où elle mène une vie de dévotion et de prière et y fonde un monastère autour duquel se développe Mons. Waudru est proclamée sainte à sa mort en 688. Depuis, les Montois attribuent bien des miracles à leur sainte patronne, dont celui d’avoir mis fin à la peste qui sévissait dans leur région en 1349. En guise de remerciement, des chanoinesses font construire, en 1450, la cathédrale Sainte-Waudru qui, à ce jour, abrite son corps dans une châsse. Les fidèles organisent une procession en son honneur. Au rythme du Doudou Toujours est-il que, pendant dix jours, Mons vit au rythme du Doudou. «On y pense toute l’année, dit Benoît, un Montois d’origine. Comme bien d’autres ici, j’ai pris congé pendant une semaine pour le Doudou.» Fête des Montois comme des «chambourlettes» (les invités), la Ducasse de Mons débute la fin de semaine de la Trinité, juste après la Pentecôte. La fête consiste donc en deux jeux : celui de sainte Waudru et celui de saint Georges, qui combat un dragon. Parmi les moments forts du Doudou, reconnu depuis 2005 par l’UNESCO au titre de chef-d’oeuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité: la descente de la châsse des reliques de Sainte-Waudru, la procession, la montée du Car d’or, le combat appelé «Lumeçon». Mille sept cents participants, répartis en 71 groupes, défilent en costume d’époque. Oufti! Une fête qui remonte au XIVe siècle Face à l’hôtel de ville, sur la Grand-Place, des milliers de personnes en liesse attendent l’arrivée de saint Georges, ses 11 diables, 12 chins-chins taquins, 11 hommes-blancs et huit hommes-de-feuilles. Un foule de 40 000 personnes avides d’arracher le crin porte-bonheur qui termine la queue du fameux dragon lorsque ce dernier donne des coups de queue au public. «On dirait la révolution, mais tout se passe en général très bien », explique Michaël Miraglia, Montois d’origine, journaliste et coanimateur de l’émission On n’est pas des pigeons sur la chaîne de RTBF. «Le Doudou est une fête rodée qui remonte au XIVe siècle, avec une charte de plus de 300 pages.» Quand même, à voir comment la foule se bat pour arracher un poil de la queue d’el biète, le dragon, eh bien… ça donne les kiekebiche (chair de poule, en belge)! Capitale culturelle de la Wallonie depuis 2002, Mons a obtenu le titre très convoité de Capitale européenne de la culture pour 2015. Son slogan : «Là où la technologie rencontre la culture.» Parmi les quatre personnalités historiques choisies pour fédérer les expositions, les concerts et les spectacles proposés durant cette année, il y a le peintre Vincent Van Gogh qui a vécu à Mons fin 1879-début 1880, le musicien Roland de Lassus qui y est né en 1532, le poète Paul Verlaine qui a été emprisonné là de 1873 à 1875, et saint George, le saint du Doudou. Un p’tit verre de mousseux pour fêter ça. Et pas le moindre. Le Ruffus. Un blanc de blanc 100 % chardonnay et 100% belge, issu des coteaux binchois, dans le vignoble des Agaises. Un crémant aux allures de champagne royal qui, parions-le, coiffera au poteau, lors de dégustations à l’aveugle, les meilleurs champagnes. «De quoi mélanger ses tartines» (perdre la tête, en belge). Tournée à Tournai Au-delà de la ville de Mons, de sa remarquable Grand-Place, de son beffroi de style baroque classé au Patrimoine de l’UNESCO, de sa ducasse à tout casser, il y a dans un rayon de 100 kilomètres de Bruxelles, en Wallonie, des villes incontournables, et ce, pour qui s’intéresse à l’art, à l’architecture, à l’histoire, à la nature, aux traditions, au folklore et, bien sûr… à la gastronomie belge. Une tournée à Tournai plonge le visiteur au temps de Clodion, chef des francs saliens. En 431, le plus ancien roi de la dynastie des Mérovingiens fait de la cité sa capitale. Quelques décennies plus tard, Clovis lui préfère Paris. Située à 88 kilomètres de Bruxelles, il faut trois heures pour visiter la vieille ville picarde. Son beffroi atteint 72 mètres de hauteur. Grimper les 257 marches qui mènent à son sommet est une mise en jambe redoutable. De quoi donner le tournis! Inscrit aussi au Patrimoine de l’UNESCO, le bâtiment de style néogothique serait le plus ancien de la Belgique. Quant à la cathédrale Notre-Dame de Tournai, un monument également «inscrit», ses cinq tours romanes de 83 mètres de hauteur ont valu à la ville le surnom de «Cité aux cinq clochers». Sans doute un projet architectural audacieux à l’orée du XIIe siècle ! Mais il aura fallu le passage d’une tornade, en août 1999, pour réaliser la fragilité du chef-d’oeuvre romano-gothique. Ipso facto, des travaux de rénovation sont prévus jusqu’en 2017. Ce qui n’empêche pas d’en faire le tour, avant de continuer son chemin vers la Grand-Place, pour une tournée de Tournay, cette bière artisanale bien de Tournai, entièrement naturelle. Chocolat, gaufres, bière et frites alors! À l’évidence, les clichés ont la vie dure: musées, châteaux, citadelles et pierres sacrées, artisanat, folklore et traditions. BD aussi. Bien sûr, la Belgique, c’est tout ça. Mais que serait ce petit royaume d’une longueur de 282 kilomètres d’est en ouest et de 145 kilomètres du nord au sud sans ses bières, ses moules, ses pralines, ses gaufres, ses pèkèts, son whisky wallon, ses spéculoos, ses tartes? Sans doute comme la Caramilk sans caramel ou le sunday sans cerise. Et la Wallonie sans ses frites, alors? Impossible. Et la frite, ici, c’est du sérieux. Elle a même sa charte. Comme le Doudou de Mons. N’est donc pas frite qui veut : une bonne frite aurait une dimension d’un centimètre de côté, une première cuisson à 150 degrés et une seconde à 175. Bien que les Français en revendiquent la paternité et en pratiquent aussi la double cuisson, la légende belge raconte que la frite aurait été inventée au XVIIIe siècle par les Namurois qui avaient l’habitude de faire frire les petits poissons pêchés dans la Meuse. Et lorsque celle-ci gela, ils remplacèrent le menu fretin par la patate découpée en petits poissons, qu’ils passèrent à la friture. À Bruxelles, les fritkots (baraques à frites) embaument les coins de rue, les places, les parcs et les marchés. Certaines semblent plus populaires que d’autres, comme la Maison Antoine, place Jourdan à Etterbeck, et la friterie de la Barrière, à une encablure de la célèbre statue La porteuse d’eau de Julien Dillens, à la barrière Saint-Gilles. Mais Bruxelles ne fait pas que dans les frites. Et encore moins cette année, alors que la capitale de la Belgique et de l’Europe, deuxième ville la plus verte d’Europe (après Vienne), a pour thématique la gastronomie. Depuis janvier 2012, Brusselicious met en lumière toutes les composantes de l’art de vivre gourmand à la bruxelloise. À l’honneur: les grands chefs, bien sûr, mais aussi les produits et les producteurs, les recettes traditionnelles, les charrettes à caricoles, les légumes oubliés et retrouvés, les bières… En vrac Transport. Air Canada assure une liaison directe Montréal-Bruxelles. Hébergement. À Tournai, l’Alcantara est un petit hôtel de 17 chambres tout à fait charmant avec des propriétaires accueillants. Les gîtes du Vieux-Namur sont quatre gîtes dans un même immeuble sous forme d’appartement pour deux personnes (salon, cuisine équipée, espace bureau, wi-fi… une alternative à l’hôtel. À Bruxelles: le Méridien, à deux pas de la Grand-Place. Restauration. À Mons, pour une bonne table: Les Gribaumonts. La «formule confiance» proposée par Lisa, la chef propriétaire (avec son mari Nicolas) comprend cinq plats avec les vins en accord. À Namur, au restaurant étoilé du chef Pascal Pirlot: La petite fugue. La carte automnale propose entre autres truffes de foie gras, huîtres de Gillardeau pochées, homard gingembre/citronnelle/citron vert/coriandre À Bruxelles: Bonsoir Clara, pour découvrir une bonne table près du quartier des Halles Saint-Géry et percer le mystère de Clara. Qui est-elle? Une inconnue qui passe? Une maîtresse sublimée? Une maman? Table d’hôte chez Madame Toefaert (la première femme au monde à être nommée experte en vins rares et de collection), au deuxième étage de son appartement privé de la galerie de la Reine. Madame Toefaert est membre de Karikol, l’antenne bruxelloise du mouvement Slow Food. Elle fait chanter les vins tout en concoctant une cuisine simple et raffinée. Enfin, le restaurant étoilé tout en élégance et en raffinement Chalet de la forêt: le chef Pascal Devalkeneer, un ardent défenseur de la cuisine de saison, n’utilise que des ingrédients issus d’une culture naturelle. Il est aussi membre de Slow Food. À ne pas manquer. Une visite de l’atelier du chocolatier Laurent Gerbaud, rue Ravenstein 2. Une dégustation de bière chez Moeder Lambic, le temple de la mousse. Le lambic est la seule et dernière bière produite à partir d’une levure naturelle présente dans l’air de Bruxelles. Aussi varie-t-elle. Une visite à la Maison Dandoy, rue au Beurre, près de la Grand-Place. On y fabrique depuis 1829 les fameux speculoos, biscuits au beurre, au sucre et aux épices. À ne vraiment pas manquer. En novembre, dans le cadre du Festival Fritkot Brusselicious, Visitbrussels mettra en avant les fritkots (baraques à frites) de Bruxelles. Des cornets de frites vides aux couleurs Brusselicious seront distribués dans les gares, à l’aéroport, aux feux rouges et dans les points d’information touristique. L’idée ? Passer avec ce cornet vide à l’un des fritkots participants et le faire remplir pour le montant symbolique d’un euro. Top 10 des fritkots bruxelloises. Les marchés traditionnels de Noël prennent place début décembre dans presque toutes les villes de la Belgique. Mal de gorge? Au lieu d’aller à la pharmacie pour des pastilles, se procurer à la pâtisserie Quesnoy, 2, place Crombez, à Tournai, une boîte de Ballons noirs de Tournai, un bonbon dur à base de cassonade, de sucre et de glucose aux valeurs thérapeutiques, qui fait la réputation de Tournai depuis 200 ans. La pâtisserie Quesnoy est la seule à les fabriquer.

  • Montérégie - Ça brasse au festibière de Chambly

    C'est parti ce week-end pour une septième édition de La Fête bières & saveurs, sur le lieu historique national du Fort-Chambly. L'événement, d'inspiration Nouvelle-France, invite le public à une découverte de la bière et des produits du terroir québécois. Un moyen éducatif de réunir des foules de tout âge autour d'une même quête: le plaisir épicurien. Jongleurs, magiciens, musiciens, acrobates, échassiers, conteurs, cracheurs de feu, chefs, tous sont prêts à accueillir les festivaliers du Québec. La fête commence à 13h aujourd'hui et se poursuit jusqu'à lundi soir, à Chambly, alors que la Corporation récréotouristique du bassin de Chambly présente la Fête bières & saveurs. «On annonce du beau temps», assure Nicole Vincelette, directrice du festival, qui souhaite accueillir quelque 60 000 visiteurs. La Fête bières & saveurs, en association avec la Société des chefs, cuisiniers et pâtissiers du Québec, portera au pinacle, bien sûr, la bière, celle du Québec et d'ailleurs, mais aussi des vins et des cidres du pays et une fine gastronomie composée de produits du terroir québécois. «Cet événement n'est pas une foire, mais un lieu où le savoir-vivre incite au développement de la culture épicurienne, au réveil des sens et de tous les plaisirs organoleptiques», déclare le chef et copropriétaire du restaurant Fourquet Fourchette, François Pellerin, président d'honneur de la Fête bières & saveurs, qui juge l'événement sur le site du Fort-Chambly comme la plus belle fête champêtre du Montréal métropolitain. D'un stand à l'autre L'événement a donc lieu aux abords du bassin de Chambly, renommé pour son fort, ses écluses, son canal et sa bière brassée par Unibroue, partenaire de l'événement. Trois jours durant, les festivaliers pourront butiner d'un stand de produits de dégustation à l'autre, goûter aux bières artisanales et de microbrasserie, aux vins et aux cidres, aux produits du terroir et à de bons petits plats de restauration. On pourra également assister à une trentaine de conférences sur des thèmes tels «Bières et chocolat», «Pains biologiques», «Bières et fromage», «Bières et dessert», «Découverte du Québec gourmand», «Faites vivre votre barbecue», ainsi qu'à de nombreux spectacles présentés sur l'une ou l'autre des cinq scènes prévues pour l'occasion, happenings ouverts à tous et gratuits. Dieu du ciel À cela s'ajouteront des démonstrations culinaires en compagnie d'une trentaine de chefs, dont Yves Davignon, Jean-Paul Grappe et Bruno Gagné, et de petites confidences culinaires entre le président d'honneur, François Pellerin, et le porte-parole de la fête, Jeff Boudreault. «Ils nous parleront entre autres de leurs secrets pour réussir un barbecue», dit Nicole Vincelette. Chaque année, la fête met en valeur une nouvelle bière. Les artisans brassicoles ont donc été invités à concocter une «belle brune» de leur cru. Pour aider le jury à déterminer la meilleure et la plus savoureuse des 16 bières mitonnées, le public est invité à les goûter, puis à voter. Cette année, on a choisi comme bière officielle de l'événement, la «Brune», de couleur acajou et au goût de malt, fruitée en bouche, créée par la microbrasserie Dieu du ciel. Quant aux jeunes, ils n'ont pas été laissés pour compte. La Scène des petits seigneurs propose un programme de danses, de contes et de spectacles où les enfants sont invités à bouger, rigoler et chanter. Par des ateliers dynamiques et éducatifs, ils seront invités à goûter aux plaisirs de la table et aux produits du terroir. Sous la supervision d'un chef cuisinier membre de la Société des chefs, cuisiniers et pâtissiers du Québec, ils apprendront à composer des mets simples, rapides et rigolos. Une halte-répit sans frais animée par des moniteurs à été prévue pour les petits de deux ans ou plus, tout comme une aire spéciale pour les nourrissons, avec table à langer, chaises berçantes, salles d'allaitement et équipement pour réchauffer les biberons. Il y aura également un gigantesque stand de bière présenté par Unibroue, un stand de restauration aux saveurs du Fourquet Fourchette, de la danse et du folklore populaire, de la musique, des spectacles et des contes d'antan ainsi que, aux abords du Richelieu et du fort Chambly, un grand marché public pour faire ses courses, comme à l'époque de la Nouvelle-France. Dans une perspective de développement durable qui s'intègre au virage Chambly VERT l'avenir, les festivaliers sont invités à utiliser le service de navettes locales offert gratuitement aux visiteurs. Le départ des autobus aura lieu dans le stationnement situé au coin du boulevard Industriel et de la rue Simard, aux demi-heures les samedi et dimanche, entre 11h et 20h30, et le lundi de 11h à 19h. Quant aux Montréalais qui désirent se rendre en autobus sur le site de la fête, ils pourront emprunter le service-ajout de Navette Express entre Montréal et le fort Chambly. Le départ se fera du terminus Centre-Ville, situé au 1000, rue de la Gauchetière. - La fête bières & saveurs: www.biereetsaveurs.com. Pour l'horaire et les prix de la Navette Express à partir de Montréal: www.citcrc.amt.qc.ca.

  • Les traditions funéraires, un patrimoine bien vivant

    Si de nos jours le rituel funéraire s'effectue de façon plus discrète dans les grandes villes, il n'y a pas si longtemps encore il occupait une place notable dans le coeur des gens. Présence du prêtre auprès du mourant, derniers sacrements, veillée mortuaire à la maison et cérémonie à l'église étaient des conditions sine qua non de la «bonne mort», la garantie d'une résurrection triomphante. Regard historique sur les cimetières, les rites et l'art funéraire québécois du XIXe siècle et du début du XXe, au Musée du Château Dufresne. Vêtu d'une longue tunique, une balance dans la main droite, un parchemin enroulé dans celle de gauche, l'ange saint Michel, peseur d'âmes, accueille le visiteur. «La balance sert à peser les âmes afin de faire la part entre le bien et le mal et le parchemin enroulé sert à évoquer la liste des justes et des damnés», explique Stéphane Chagnon, commissaire chargé de l'exposition. L'imposante oeuvre en pin du sculpteur Louis Jobin, autrefois située sur le portail d'entrée du cimetière Saint-Joseph Deschambault, à côté de l'ange à la trompette du Jugement dernier, est le point de départ de la petite mais dense exposition Le patrimoine funéraire, un héritage pour les vivants, qui se tient au Musée du Château Dufresne jusqu'au 30 août prochain. Ambiance morbide? Pas du tout! Le sujet n'est pas la mort. Enfin, pas vraiment... «On ne rentre ni dans une église ni dans un salon funéraire, précise Paul Labonne, directeur général du musée. L'exposition jette un regard historique, culturel et ethnologique sur les cimetières, de l'inhumation ad sanctos au centre funéraire d'aujourd'hui via le cimetière paroissial, ainsi que sur les rites et l'art funéraire au XIXe siècle. En parallèle, l'exposition cherche à rendre hommage aux régions du Québec qui ont su conserver leur patrimoine religieux, comme en témoigne ce catafalque blanc d'enfant fabriqué en 1920 par Omer Létourneau, charron de métier à Saint-Joseph-de-Beauce. Ou encore ce petit sarcophage en fonte prêté par le Musée Missisquoi. Bière, cénotaphe, columbarium, enfeu... Le visiteur est initié au lexique funèbre. Puis on entre dans le monde des cimetières. L'exposition a d'ailleurs pris sa source dans le très bel ouvrage publié en 2008 aux Éditions GID, Cimetières - Patrimoine pour les vivants, de l'ethnologue Jean Simard et du photographe et cinéaste François Brault. Avec les photos de ce dernier, des oeuvres d'artisans et d'artistes complètent l'exposition: stèles, mobiliers funéraires... Des pièces signées Alfred Laliberté, Louis-Philippe Hébert, Jean-Baptiste Côté. «Au départ, le cimetière paroissial situé à proximité de l'église demeure le lieu de sépulture pour la majorité de la population, note Stéphane Chagnon. À la fin du XVIIe siècle, on apprend que l'ensevelissement des défunts ordinaires se fait de façon anonyme et souvent dans des fosses communes. C'est seulement dans la première moitié du XIXe siècle que, peu à peu, la concession de lot et le monument vont permettre l'individualisation du site de sépulture. Quant aux cimetières ad sanctos, ils existaient déjà au XVIIe siècle. «Réservé à une certaine élite, l'enterrement sous les églises constituait une source de revenus considérables pour les fabriques mais n'était pas exempt d'inconvénients. Comme dans les anciennes églises il fallait déplacer les bancs et ouvrir le plancher pour procéder aux inhumations, les fidèles risquaient de tomber sur des planchers devenus moins plats à la longue. Sans compter les fortes odeurs qui émanaient du sous-sol. Au XIXe siècle, un interdit judiciaire a mis fin à cette pratique.» L'exposition traite aussi de la façon dont les confessions religieuses se souciaient de leurs morts aux XVIIIe et XIXe siècles. «En 1776, l'une des premières nécropoles juives d'Amérique est inaugurée au faubourg Saint-Antoine, à Montréal, angle nord-ouest des rues Peel et De La Gauchetière. «En 1779 apparaissent le cimetière catholique du faubourg Saint-Antoine et le second cimetière protestant de Montréal. Les premiers immigrants chinois sont inhumés dans les grands cimetières protestants devenus très tôt multiconfessionnels», souligne Stéphane Chagnon. Dans la chambre du mourant, les aiguilles de l'horloge murale sont figées à l'heure du décès. Au pied du lit, un prie-Dieu. «On faisait la toilette du mort, on le recouvrait d'un suaire, on bouchait les châssis, on allumait des cierges. Le jour, on disait le chapelet aux heures, la nuit aux heures et demie», raconte Victor Bélanger, l'un des fondateurs de la municipalité de Saint-Guy, dans les Basques. Il suffit de soulever le récepteur pour entendre le récit du conteur de 94 ans. Par respect pour le disparu, une tradition établie en 1684 interdit de transporter les morts en voiture. Mais la route est souvent longue et compte quelques pentes raides. Il faut régler l'avatar. Les premiers modèles de corbillards hippomobiles apparaissent au milieu du XIXe siècle pour pallier les problèmes causés par de longues processions funéraires dans les campagnes. On peut admirer, en fin d'exposition, un corbillard noir hippomobile sur patins d'acier, utilisé pour des enterrements l'hiver. Peu agrémenté, il servait à des défunts moins fortunés. Le Musée du Château Dufresne offre une série de conférences sur les rites funéraires des grandes religions: judaïsme, hindouisme, bouddhisme et islam, ainsi que des visites commentées des cimetières Notre-Dame-des-Neiges et du Repos-Saint-François-d'Assise, associés au Musée du Château Dufresne pour mettre en valeur le patrimoine funéraire d'ici. - Musée du Château Dufresne: 514 259-9201, www.chateaudufresne.com..

  • Oser se rendre en Haïti en touriste

    Un jus de mangue siroté sous une paillote, une randonnée sur un morne, une discussion avec un artiste, un hôtelier, un pêcheur, un paysan… Du tourisme en Haïti ? Pas si farfelue que ça, comme idée. À la condition d’être un brin curieux et vivement désireux de vivre une aventure humaine, au-delà de la simple destination soleil. Et de sortir de Port-au-Prince, qui n’a pas trop la cote, pour profiter du reste du pays. Haïti ne se résume pas à sa capitale. Sur les recommandations d’une amie, j’avais pris soin de mettre dans une poche deux dollars américains pour le panier à bagage à l’aéroport Toussaint-Louverture, puis trois dans l’autre, destinés au porteur obligatoire. « On va se la disputer, ta valise, ne la perd pas des yeux. Et sois ferme, trois dollars. » Oui, Lina, mais tu ne m’avais pas dit que le porteur serait accompagné de cinq assistants et qu’il y aurait une telle marée humaine aux portes de l’aéroport. C’était en mai 2010, quelques mois après le tremblement de terre. Comme beaucoup, j’étais touchée par l’ampleur des dégâts. Comment se rendre utile ? Je suis journaliste en tourisme, pas secouriste. Et à cette heure, le tourisme en Haïti, était impensable. Du moins, c’est ce que je croyais, jusqu’à ce que j’écoute le témoignage de Jean-Hughes Roy. Le journaliste de Radio-Canada revenait d’un séjour à Port-au-Prince avec une vision pas si négative du pays. « Je m’attendais à une situation bien plus désarticulée, avait-il dit. Mais les choses se placent petit à petit. L’aide humanitaire est opérante. Il y a de la nourriture, de l’eau. Pourquoi ne pas exprimer sa solidarité envers Haïti en prenant des vacances là-bas ? Haïti a besoin de devises, de travail, d’investisseurs. Y aller en touriste serait une façon de relancer l’économie du pays. » « Haïti demeure une destination spéciale », concède Jacqualine Labrom, directrice de l’agence Voyages Lumière, située à Pétion-Ville, un quartier de Port-au-Prince. « Mais les gens ne devraient pas accorder crédit à tout ce qui se dit sur le pays. Ce n’est pas plus dangereux de venir ici que d’aller en République dominicaine, qui détient un taux de criminalité plus élevé qu’Haïti. Haïti est en crise, pas en guerre. Et le tourisme, qui gagnait du terrain avant le séisme de janvier 2010, continue d’évoluer avec la construction de nouveaux hôtels dans le reste du pays. » Farfelue ou pas, ma décision était prise. Je partirais une semaine, question de me forger une opinion personnelle de la situation en Haïti. Était-ce aussi négatif qu’on le dit ? J’éviterais Port-au-Prince, où règne un chaos sans bon sens, et j’irais à Jacmel, à 80 km au sud-est de la capitale. Et je suis tombée sous le charme du pays. J’ai découvert des hôtels et des galeries d’art. J’ai mangé dans de bons restaurants, randonné sur de belles montagnes, exploré des grottes. J’ai rencontré un peuple accueillant et créatif. Généreux aussi. J’ai tout de suite su que je reviendrais. Un an plus tard Comme il n’existe pas de guide touristique sur Haïti dans les librairies — à l’exception d’un petit manuel publié chez Assimil Évasion, Le créole haïtien de poche, qui propose une première approche de la langue et de la culture, je m’en remets au personnel des hôtels et aux Haïtiens rencontrés au jour le jour pour découvrir le pays. C’est grâce à leur aide si chacun de mes voyages a été un succès. J’encourage le voyageur à avoir recours à cette ressource précieuse. Et si le taxi promis par l’hôtel ne se pointait pas ? « Dans ce cas, choisissez un chauffeur de taxi enregistré ou qui possède un permis de l’Association Chauffeur/Guide, conseille Jacqualine Labrom, et comme les gens d’affaires, les travailleurs d’ONG et les journalistes nombreux remplissent les hôtels de la capitale, je vous recommande de réserver votre gîte. » Ouf ! Tel que promis par le propriétaire de l’hôtel Port Morgan, à l’île à Vache, le chauffeur était au rendez-vous. Si récupérer ses bagages à l’aéroport demeure un exploit, pas de marée humaine à franchir cette fois-ci à l’extérieur. Et plus d’amas de roches au centre des rues. Moins de poussière, moins de tentes de fortune. Des routes et des carrefours en construction. « Il y a une réelle volonté de faire bouger les choses, affirme le consul général d’Haïti à Montréal, Justin Viard. En ce moment, on met les bouchées doubles pour redorer l’image du pays, mis à mal par l’Histoire et le destin, et refaire d’Haïti une destination touristique de choix. » Parmi les nouvelles constructions prévues pour Port-au-Prince : un hôtel Best Western de 105 chambres, un hôtel Marriott de 168 chambres et le complexe hôtelier Oasis, qui devrait comprendre 132 chambres, une galerie commerciale, un centre de conférence, des restaurants. Et la restauration de l’aéroport international, dont la fin des travaux est prévue pour l’été 2012. « Dans la région de Jacmel, le ministère du Tourisme prévoit à court terme la restauration du monument historique, le marché en fer de Jacmel », précise Dithny Joan Raton, directrice départementale du Tourisme du sud-est d’Haïti. « De même que la dynamisation du quartier de l’artisanat, la mise en valeur du site naturel de Bassin bleu et du Morne Laporte. Environ 150 chambres sont en construction dans la région et depuis l’an dernier on assiste à une augmentation des restaurants vers les plages de Kabik et de Marigot. » Haïti a résolument le vent dans les voiles ! « Sans compter la réhabilitation prochaine de certains aéroports régionaux en aéroports internationaux, comme ceux de Cap Haïtien, de Jacmel et des Cayes. De façon à désenclaver le pays et à permettre aux touristes d’atterrir directement dans ces régions au potentiel touristique riche, explique Justin Viard. Jacmel sera méconnaissable l’année prochaine. » Voyage à l’île à Vache « Tout ira bien, soyez rassuré, m’avait dit au téléphone Didier Boulard, cofondateur de l’hôtel Port Morgan, à l’île à Vache. M. Benoît ira vous chercher à l’aéroport, pour vous mener à l’hôtel Le Plaza, situé au coeur de Port-au-Prince. Puis le lendemain un autre chauffeur vous conduira à l’arrêt d’autobus pour Les Cayes, où un employé de l’hôtel Morgan viendra pour vous amener au quai de la ville, où une navette vous attendra. » Un parcours sans anicroche aucune. Un voyage inoubliable, dans un petit « écohôtel » au luxe rustique chaleureux et intime, construit sur les hauteurs d’une baie qui servait de refuge aux pirates au xviie siècle. Pour entretenir l’immense terrain, la piscine à l’eau de mer ainsi que les 22 chambres installées dans des cases créoles, l’hôtel emploie 40 personnes provenant du village voisin de Cacoq, où une équipe de foot du nom de Ti-Canada (ainsi nommé par un médecin montréalais qui a élu domicile à l’île à Vache) rencontre les dimanches une équipe d’un autre hameau de l’île de 48 km carrés. Pas de routes, pas d’autos, pas de bruit, si ce n’est le vent dans les palmiers, le rire des enfants sur les mornes et le piaillement des oiseaux. L’île à Vache se découvre à pied, à vélo, à dos de cheval, en bateau. En Haïti, pas de formule toute faite. « On y va sans conteste pour y vivre une aventure humaine », soutient Rodney Saint-Éloi, écrivain et éditeur de la maison d’édition Mémoire d’encrier. En vrac Hébergement Trois coups de coeur pour de petites structures qui n’ont rien du grand resort de bord de mer et qui, malgré un luxe rustique, résulte d’une approche responsable : L’hôtel Port Morgan, l’île à Vache, Didier Boulard, portmorgan.com. L’hôtel Cyvadier Plage, à 20 minutes du centre historique de Jacmel, Christophe Lang, 011 (509) 47 79 28 45/34 82 25 85/38 44 82 65. L’Auberge Inn, dans la petite ville de Jérémie, département de Grand’Anse, à l’ouest du pays, Juliette Nicolas Tardieu, 011 (509) 37 13 15 24, jc_nicolas@yahoo.com. Se renseigner auprès du consulat d’Haïti à Montréal; haiti-montreal.org/. Voyages Lumières (Jacqualine Labrom), une agence de voyages située à Pétion-Ville, à Port-au-Prince (voyageslumiere.com). Ou directement avec les hôteliers, qui sauront vous mener à bon port.

  • Laval, Québec - S'amuser au musée pour enfants

    Quel enfant ne rêve pas d'être pompier, pilote d'avion, vétérinaire, capitaine de bateau, maîtresse d'école ou actrice, de monter à bord d'une ambulance, de traire une vache ou d'activer une grue ou un marteau piqueur? Le rêve peut devenir réalité le temps d'une visite au nouveau Musée pour enfants de Laval.. Une idée originale, ce musée consacré aux enfants de moins de 12 ans: ça manquait dans la région. Il fallait bien un vérificateur d'impôt, père de quatre jeunes enfants, ennuyé par son boulot, à la recherche de nouveaux défis et doté d'une énergie débordante pour y penser! C'est en visitant le Children Museum de Portland, dans l'État du Maine, que l'idée a germé. «Mes enfants avaient tellement de plaisir à découvrir l'intérieur d'une fusée, à prendre le volant d'un camion de pompier, à se filmer en train de lire un bulletin de météo, à jouer au vétérinaire dans un hôpital pour animaux ou au garagiste dans une station-service et à actionner un marteau piqueur que je me suis dit qu'il était là, le défi: un musée interactif qui permettrait aux jeunes de démystifier le travail de policier, d'ambulancier, de capitaine de bateau, de pilote d'avion ou de chauffeur d'autobus», explique François Joly. Le Musée pour enfants de Laval se donne donc pour mission d'initier les petits aux métiers les plus souvent côtoyés en milieu urbain et à la campagne, à l'école, à l'épicerie, au garage, à la poste ou chez le médecin. En plus de découvrir l'intérieur d'une ambulance, la façon d'actionner les gyrophares et la sirène dans une voiture de la Sûreté du Québec, de prendre les empreintes digitales d'un individu et de mettre de l'essence dans une voiture, on peut aussi pêcher du pont d'un bateau, grimper sur une échelle de corde pour éteindre un feu, retirer de l'argent d'une distributrice, se costumer, se filmer, se regarder à la télévision, se promener dans une grotte préhistorique ou simplement ramasser des oeufs dans un poulailler ou encore traire une vache. Dans le bâtiment de deux étages, qui compte 18 salles dont trois consacrées aux fêtes d'enfants, on passe d'un métier à l'autre et de découverte en découverte. Si une place importante est accordée à l'imagination et aux jeux de rôles, la participation des parents est importante afin que la démarche d'apprentissage soit une réussite. Il ne faut donc pas perdre de vue que l'endroit est un musée, à la différence que là, les enfants vont pleurer pour rester et non pas pour partir. - Musée pour enfants de Laval, www.museepourenfants.com. Publié dans le Devoir du 30 juin 2006

  • Estrie - Chanter la pomme au Gros Pierre

    Pomme écrabouillée, pomme débarbouillée, pomme pressée, tarte aux pommes, baluchon aux pommes, gelée de pommes et pomme tout court. Pourquoi ne pas profiter du week-end pour aller chanter la pomme au verger Le Gros Pierre, à Compton? Summered, Lobo, McIntosh, Cortland... on y cueille, mitonne, transforme, conditionne, explique la pomme, avec générosité, au nez et à la vue des visiteurs. Un verger pas tout à fait comme les autres ! La terrasse-crêperie du Gros Pierre domine le verger et ses 8000 pommiers chargés du fruit mythique. Au loin se dessine le profil du Mont-Orford, qui se découpe joliment sur le ciel bleu. Une odeur de pommes chaudes nous titiller les narines. Impossible de ne pas craquer pour la tarte aux pommes paysane, la crêpe pomme et chocolat ou la crêpe Gros Pierre fourrée au fromage. «Que retient-on le plus d'un voyage» , interroge Diane Goyette, copropriétaire du verger Le Gros Pierre, à Compton? «L'accueil et les rencontres», affirment celle qui dans une autre vie fut enseignante au cégep. «En voyage, il doit y avoir des rencontres, et c'est souvent autour d'un repas qu'elles se font. C'est donc ce que nous avons voulu créer ici, une ambiance conviviale.» Selon la pomicultrice, «si on néglige cet aspect en agrotourisme, on loupe tout.» Et bien ce n'est pas loupé au Verger Le Gros Pierre, où Diane Goyette, son associé, Gaétan Gilbert, et leur petite équipe se préoccupent de bien recevoir les gens, comme autrefois, et de communiquer de façon généreuse leur savoir-faire de pomiculteur. Si l'idée n'est pas nouvelle — la maison mère Ben & Jerry, au Vermont, dévoile ses secrets de cuisine aux visiteurs depuis des lunes déjà — elle n'en n'est pas moins avant-gardiste. Au Gros Pierre, on examine la pomme sous tous ses angles, du «sol à l'assiette», depuis son origine, il y a plusieurs millions d'années, jusqu'à sa métamorphose complète, sous forme de tartes, de baluchons, de gelée, de compote, de jus. Jusqu'à présent, le verger Le Gros Pierre est le seul centre d'interprétation de la pomme reconnu par le ministère du Tourisme du Québec. C'est en France, vers la fin des années 1970, que Diane Goyette et Louis Poulain ont appris le métier de pomiculteurs. «Ce n'est pas d'hier que l'on s'intéresse à la pomme, là-bas, explique Madame Goyette. Si nous avons été les premiers Québécois à planter en 1980 des pommiers nains, ils existaient déjà au pays de l'Hexagone sous Louis XIV.» Selon elle, la France et la Hollande se distinguent par leur technologique avancée en matière de culture de la pomme. Balade en tracteur, sentier d'interprétation, aires de jeux, cueillette, dégustations, rien n'est laissé au hasard dans ce verger des Cantons-de-l'Est. À l'instar de l'économusée, qui fait revivre les vieux métiers, Le Gros Pierre ouvre les portes de sa cuisine pour permettre l'observation du processus de transformation de la pomme, en tartes ou en baluchon (pomme entière caramélisée, farcie de raisins au rhum, enveloppée d'une pâte feuilletée). Beaucoup de pommes Au Gros Pierre, on pèle encore les pommes à la main, soit environ 180 kg par jour. À elle seule, l'épaisse tarte campagnarde nécessite 900 grammes de pommes en gros morceaux, et pour sa fabrication, qui est artisanale, on n'utilise aucun procédé chimique. Plus spectaculaire encore: la fabrication du jus de pommes avec une presse hydraulique manuelle au lieu d'un procédé industriel. Durant la fin de semaine, on engage des étudiants pour peler les pommes et tourner la manivelle du presse-jus artisanal, dont la capacité de production est de 1200 gallons par jour. Saviez-vous que c'est en 1617 que le premier pommier cultivé a fait le grand voyage vers l'Amérique ? Que Louis Hébert en planta les premiers arbres, près de Québec ? Et que la McIntosh est une pomme «détestable»? «Les gens n'aiment pas que l'on dise du mal de la McIntosh, qui représente la pomme "de référence" chez nous, raconte Diane Goyette. Mais pour la pomicultrice, cette pomme mi-sucrée, mi-acidulée, découverte en Ontario par John McIntosh en 1796, se comporte comme un adolescent. «C'est une variété difficile à travailler, un arbre qui ne veut pas s'arrêter de grandir. La pomme est croquante et juteuse lorsque cueillie à point, mais après deux semaines elle devient molle. En plus, elle contracte toutes les maladies. Par contre, la McIntosh est un bon parent et compte parmi ses petits la Spartan, la Cortland et l'Empire.» Club de production «Le verger n'est pas certifié biologique, mais "Production fruitière intégrée (PFI)", une attestation un cran sous le bio, explique Diane Goyette. Ici, on tolère les petites taches brunes sur le fruit. Les abonnés au PFI tiennent un cahier des charges et interviennent avec des pesticides moins résiduels. «Comme Le Gros Pierre fait aussi partie d'un club de production, un technicien passe régulièrement pour nous informer des nouveautés dans le domaine de la pomiculture.» Parmi les variétés de pommes croquantes, on trouve au Gros Pierre la Summered, la Lobo, la McIntosh, la Cortland, la Red Cort, la Spartan et la Honeycrisp. «Cette dernière, qui atteindra sa maturité autour du 20 septembre, est la pomme de demain, affirme la pomicultrice passionnée. Chair jaune, croustillante, au goût de miel... C'est un coup de coeur.» Si la tendance se maintient, ce week-end pourrait être celui de la Cortland, une variété qui parvient à maturité aux environs du 19 septembre. «Grosse, ferme, blanche, peu acide avec une chaire à gros grain, elle est bonne à cuire, donne des tartes et des compotes sublimes, et résiste au brunissement.» Le Gros Pierre, 6335, route Louis-S.-St-Laurent (route 147), Compton. Pour en savoir plus sur la pomme, la variété du jour et ses activités: % 1 819 835 - 5549 et www.grospierre.com

  • Pas bête un zoo l'hiver

    Article publié dans le Devoir du 13 janvier 2012 À peine la programmation des Fêtes terminée que prend place dès demain le Carnaval du Zoo de Granby. Pendant qu'au sommet des montagnes himalayennes le léopard des neiges bondit d'un rocher à l'autre, qu'en Afrique les zèbres défilent en un long ruban de rayures sur la neige et les chameaux promènent les enfants emmitouflés, cracheur de feu, sculpteur de glace et animateurs égaient la jolie ménagerie tous les week-ends jusqu'au 26 février. «C'est pour ajouter un peu de piquant à la visite du jardin zoologique qu'on a greffé des volets à la programmation régulière du Zoo l'hiver, dont Le Carnaval qui commence demain et La Relâche au zoo qui se tiendra du 3 au 11 mars», explique Hélène Bienvenue, conseillère en communication au Zoo de Granby. Bien des gens ignorent que l'endroit ouvre ses portes tous les week-ends de l'hiver depuis cinq ans; le déplacement en vaut pourtant la peine, ne serait-ce que pour profiter de la quiétude des lieux et du fait que les animaux à l'extérieur ont moins tendance à roupiller à l'ombre de leur hutte et sont donc plus visibles. Pour profiter aussi de la proximité avec les bêtes qui vivent à l'intérieur, comme les girafes Kigali, Kisumu, Masai et Gart, et les éléphants Toutoune et Sarah. Les deux pachydermes d'origine africaine, âgés de 34 et de 28 ans, mangent 50 kilos de foin par jour, dit Simon Paquette, biologiste au Zoo de Granby. «Toutoune, qui vient de recevoir un traitement à l'huile minérale pour protéger sa peau du froid, pèse quatre tonnes et demie.» Sarah, elle, n'en fait que trois et demie! La présence sur le terrain de guides naturalistes rend la visite encore plus fascinante. Moins occupés qu'en été, ces passionnés partagent volontiers leurs connaissances: développement durable, protection de la biodiversité, préservation de la nature et lutte contre les changements climatiques sont abordés par ces amoureux de la faune et de la flore. Le Zoo de Granby se parcourt au gré de ses fantaisies. Et une journée ne suffit pas pour y voir tous les animaux, une collection de près de 1000 bêtes dont 80 % sont visibles en janvier, février et mars. Des sentiers mènent vers l'Afrique, l'Amérique du Sud, l'Asie et l'Océanie, où sont regroupés les animaux de ces régions du monde. Des foyers à ciel ouvert Tigre de l'amour, lama, alpaga, condor des Andes, grue japonaise et macaque japonais sont autant d'espèces exotiques qui connaissent le froid dans leur habitat naturel et qui ont réussi à s'adapter au climat québécois. Et même si c'est frisquet, on peut entrer dans l'un des sept pavillons intérieurs. Des foyers à ciel ouvert disposés à plusieurs endroits sur le site et entourés de bancs publics permettent aux visiteurs de se réchauffer entre deux continents. Des familles ont même apporté un pique-nique, qu'elles dégustent autour du feu de bois. De l'Asie à l'Océanie Direction Porte d'Asie où nous attend Sylvain, le gardien du léopard des neiges. Au sommet de l'Himalaya, dans un parc voisin, un ours himalayen au pif brun nous observe. Dis donc, il n'hiberne pas, lui? Non, on dit que par mauvais temps il ne fait que ralentir ses activités. Snowflake, la femelle léopard, est entourée de ses petits, Frimas et Blizzard. Née au Zoo de Winnipeg, la féline au pelage noir et beige est arrivée en 2006 à Granby. Son enclos rappelle les montagnes de l'Himalaya; le léopard des neiges habite en altitude. «Quelque 60 % de la population vit en Chine, 40 % en Asie centrale, explique Sylvain. Malheureusement, le léopard des neiges est en voie de disparition, comme bien d'autres espèces animales représentées au Zoo de Granby. Non seulement perd-il de son habitat, mais il est en conflit avec les éleveurs de bétail qui, pour sauver leur troupeau, n'hésitent pas à l'abattre. Il est aussi la proie des braconniers en quête de fourrure. Quant à ses os, on en raffole en médecine asiatique.» Nous quittons à regret le continent asiatique pour aller nourrir et cajoler les raies chauve-souris au pavillon Odyssée Pacifique Sud. La consigne est claire: bien se laver les mains avant de les plonger dans le bassin d'eau peu profond où nagent les poissons plats. Le repli de la peau que l'on prend pour la bouche ne sert en fait qu'à attraper la nourriture. La vraie bouche est ventrale. Après avoir fait le tour des aquariums, tenté sans succès de photographier à travers la vitre le chirurgien bleu à palette, celui qui joue le rôle de Doris le poisson amnésique dans le film Nemo, et lu que «cinq cents tonnes d'hippocampes entrent chaque année dans la confection de quelque 90 produits», on se dirige vers la salle de spectacle multimédia pour une traversée sous-marine du Pacifique Sud, de la Nouvelle-Zélande à l'Australie, sur les traces de la tortue Kaïla. Au début, les spectateurs prennent place sur des bancs éclairés en forme de méduses. Du plafond pendent des coraux et des coquillages multicolores. La magie opère dès que commence la production signée Moment Factory, un studio spécialisé dans la conception et la réalisation d'environnements multimédias. Un mélange de vidéo, d'éclairages, d'architecture, de son et d'effets spéciaux. Au cours du voyage, Kaïla croise des poissons tropicaux, des méduses de toutes les couleurs, une pieuvre géante et des requins. On suit le rythme de la musique qui change en fonction des dangers rencontrés, des moments de joie, des rencontres. Au grand bonheur des enfants, on peut se déplacer librement dans la salle et danser au rythme de la musique envoûtante.

  • Québec - L'Eau à la bouche a de la gueule

    Après 27 ans, la chef Anne Desjardins et son mari Pierre Audette, les propriétaires de l'Eau à la bouche, s'investissent toujours avec autant de passion dans l'entreprise familiale: chambres redécorées, hall principal rénové, ajout d'un café-salon dans l'hôtel et ouverture l'automne dernier d'un spa nordique. «Après les événements du 11 septembre 2001, nous avons réalisé que le monde était fragile, explique la chef. On sentait que les gens avaient besoin de réconfort. Pourquoi pas un spa qui serait spécifiquement voué à leur bien-être? D'abord, un jeune couple diplômé en géographie achète en 1979 une petite maison au bord de la route 117, à Sainte-Adèle. Puis, ce sera la transformation de la maison en restaurant style bistrot. Commencent alors les cours à l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, à l'École hôtelière des Laurentides à Sainte-Adèle, à la Fondation Auguste-Escoffier à Cannes... En 1987 vient la décision d'accoler au resto un hôtel de 25 chambres et de devenir, deux ans plus tard, membre de la prestigieuse chaîne Relais & Châteaux. Et pour couronner le tout, on a récemment ajouté un spa nordique qui a maintenant pris son rythme de croisière. Ce qui a permis aux tenanciers de développer des programmes aux noms évocateurs comme le Volupté, le 7e ciel, Adam et Ève, l'Évasion d'un jour, la Remise en forme: des forfaits d'une journée incluant le petit-déjeuner ou le déjeuner, l'accès aux bains nordiques, de même que les massages, exfoliations et enveloppements. En matinée, les enfants de 5 à 12 ans accompagnés d'un adulte ont accès aux bains et peuvent tester un massage suédois de 30 minutes. Au rythme des saisons Dans un aménagement moderne complètement neuf, le spa de ce Relais & Châteaux propose des massages suédois et aux pierres volcaniques, mais aussi des exfoliations au riz biologique ou au sucre d'érable à base de sève, et un enveloppement au beurre d'érable avec la gamme de produits B. Kamins, un chimiste qui, lors d'un voyage dans le Grand Nord, constatait que les érables demeurent vigoureux malgré un climat très revêche. Il en conclut, après 30 ans de recherche, que la sève d'érable contient des produits réparateurs, toniques, hydratants. À l'exception du bain de vapeur, il faut s'aventurer à l'extérieur, entre bouleaux et sapins, pour accéder au sauna, au bain tourbillon et à sa cascade, ainsi qu'au bain d'eau froide. Bassins en pierre, chaises longues, barbecue, joli boisé et atmosphère calme... tout a été pensé pour faire une pause, hiver comme été. Et c'est fou comme la ville apparaît loin derrière! Ski alpin, ski de randonnée, promenade en traîneau, piscine extérieure, randonnée pédestre, golf, pêche, équitation et vélo rythment les saisons de l'Eau à la bouche. Des forfaits variés sont aussi offerts aux gens d'affaires, qui trouvent sur place tous les services indispensables au bon fonctionnement d'un congrès, d'un séminaire ou d'un conseil d'administration. C'est pour se gâter qu'on vient à l'Eau à la bouche, dont la réputation repose avant tout sur sa table et sa carte des vins. On peut difficilement résister au menu découverte composé d'un trio d'huîtres de Colville Bay, de l'Île-du-Prince-Édouard, d'un filet d'omble chevalier poêlé, d'un foie gras frais de la Montérégie poêlé, d'un sanglier braisé comme dans un tajine, d'un Alfred le fermier, un fromage cru de Compton, et d'un dessert exotique, le tout arrosé de cinq vins différents. L'Eau à la bouche possède une cave à vin de plus de 4000 bouteilles. Anne Desjardins renouvelle sa carte quatre fois l'an, au rythme des saisons et en harmonie avec les produits du terroir québécois. Une quête permanente, mais primée. Les honneurs Depuis 1986, l'Eau à la bouche multiplie la récolte d'honneurs: prix d'excellence du Wine Spectator, accession au prestigieux titre de relais gourmand de la chaîne Relais & Châteaux, prix Renaud-Cyr qui récompense les efforts d'un chef québécois à établir des liens avec les producteurs, et le titre de chevalier de l'Ordre national du Québec décerné pour la première fois à un acteur du domaine de l'hôtellerie et de la cuisine. La chef, géographe de formation qui rêvait de journalisme, mijote maintenant ses petits plats en compagnie de son fils Emmanuel, tombé dans la marmite à sa naissance. Il est d'ailleurs possible, les vendredis et samedis, de participer à un stage en cuisine orchestré par la mère et le fils, un forfait comprenant veste de cuisinier personnalisée, hébergement, petit-déjeuner, cours de cuisine, souper gourmand et certificat de stage. Un séjour très convoité. Tout pour donner l'eau à la bouche. Publié dans le Devoir du 7 avril 2007

  • Costa Rica - La pura vida

    Publié dans le Devoir du 30 octobre 2004 Couvert d'épaisses forêts, laboratoire biologique à ciel ouvert, le Costa Rica est surtout fréquenté pour sa flore et sa faune exceptionnelles. Mais ce petit pays, bordé à l'est par la mer des Caraïbes et à l'ouest par l'océan Pacifique, est aussi un territoire parsemé de volcans actifs, de bords de mer idylliques et d'aventure à profusion. Et que dire des Ticos, ce peuple chaleureux? Un pays à découvrir au-delà de la promenade biologique. Un écriteau annonce Dos Pinos, petit port d'embarquement à 60 kilomètres de Siquirres, étape tranquille entre la capitale San José et la côte caraïbe. C'est là que nous embarquons pour un safari de trois jours dans le parc national de Tortuguero. La traversée jusqu'au village du même nom dure deux heures. Le capitaine n'est pas pressé : si un caïman daigne montrer son large museau, eh bien, on prendra le temps nécessaire pour l'observer. « Profitons du moment », lance Jorge, notre guide. C'est ça, la pura vida ! Accessible uniquement en bateau par un réseau de lagunes, le parc national de Tortuguero cultive le mystère. Il rappelle l'Amazonie. On y vient pour observer la nature au coeur de la jungle d'où résonnent cris, chants et bruissements. La forêt est si dense que le champ de vision est réduit à quelques mètres seulement. Impossible de pénétrer plus en profondeur ce milieu farouche ! Toucans, perroquets, crapauds et singes hurleurs tiennent le crachoir sans pour autant faire bouger d'un poil le paresseux, qui n'en finit plus de dormir à la cime d'un arbre. Notre guide fixe la rive : « Là... Sur un lit de feuilles mortes... À gauche de l'arbre ! Un caïman assoupi. » Mince, on dirait un bout de bois. Tiens, un papillon bleu ! « C'est le Morpho peleides limpida », précise Jorge. La présence du guide Jorge, les trois premiers jours, a permis de nous acclimater avec les moeurs et coutumes du pays, ce qu'il en coûte pour y vivre et les habitudes alimentaires, avant de prendre les routes du Costa Rica. Jorge ne manque pas une occasion de nous renseigner sur la faune et la flore de son pays. Il a compris que l'équilibre du Costa Rica passait non seulement par la culture de la banane, de l'ananas et du café, mais aussi par le respect de l'environnement, un attrait touristique important qui se traduit en or vert. Fondé dans les années 1920, ne profitant de l'électricité que depuis une trentaine d'années et où peu de personnes disposent d'un téléphone à la maison, le village de Tortuguero abrite 500 habitants qui vivent au rythme du tourisme. Jadis un village de pêcheurs afro-caribéens, il est maintenant peuplé aussi par des Nicaraguayens. Les rues étroites, les maisons colorées et la petite église confèrent à l'endroit un caractère irrésistible. Plusieurs hôtels rustiques bordent les canaux et offrent des tours guidés en pirogue. On peut également se balader en kayak sur les lagunes, sans accompagnateur, à l'image du Costa Rica, qui se découvre aisément d'un bout à l'autre de son territoire. Situé entre le Nicaragua et le Panama, ce petit pays d'Amérique centrale, de la taille de la Suisse, est une terre d'aventure exceptionnelle à découvrir en toute liberté : jungle, montagnes, plages, rivières, tout est accessible aussi bien en voiture qu'à pied, à cheval ou en bateau. Le Costa Rica abrite entre autres 10 000 espèces de plantes, 1550 d'orchidées, 15 000 de papillons, 34 000 d'insectes, 800 d'oiseaux, soit 5 % de toutes les espèces végétales et animales de la planète. Une terre qui grouille d'activité de toutes sortes, au pays des Ticos (les Costaricains). Itinéraire sur mesure Après ce premier contact, nous avons parcouru le Circuit en liberté de Tours Mont-Royal, qui comprend le billet d'avion, la voiture, l'hébergement, quelques activités et certains repas. «Ces forfaits offrent beaucoup de latitude et de liberté de mouvement, note Luce Prud'Homme, directeur du marketing chez Tours Mont-Royal. Il n'y a pas d'horaire fixe autre que celui d'être à son hôtel au jour dit. Sans dépendre d'un groupe, on s'arrête et on repart quand on veut. Cette formule semble convenir de plus en plus aux baby-boomers friands d'aventure et de liberté. » Les tarifs préférentiels du voyagiste, dans certains cas, représentent une économie par rapport à un voyage que l'on organiserait seul. Et une économie d'énergie aussi, puisqu'on nous suggère un itinéraire adapté à nos besoins. Le Costa Rica se prête bien à cette formule. « En premier lieu, le pays est sécuritaire, répond Marie Boivin, vice-présidente développement des produits chez TMR. Au delà de cela, bien sûr, il y a la faune, la flore, l'aventure et de nombreuses activités sportives comme la randonnée pédestre, l'équitation, le rafting et le "canopy tour", l'attraction-vedette du pays. » Le canopy tour est l'équivalent des circuits « d'arbre en arbre » au Québec. On se suspend à une poulie et on se laisse glisser sur un câble relié aux arbres à une hauteur impressionnante, entre les branches et les lianes de la forêt tropicale, façon Tarzan. Parfois, la distance entre deux arbres peut atteindre 140 mètres. Les moins casse-cou ont le choix des sky walks, ces randonnées pédestres sur ponts suspendus qui permettent de découvrir la canopée sans attraper un torticolis. Après la visite de Tortuguero, nous voilà en route pour Fortuna, au pied du volcan Arenal, l'un des plus actifs au monde. De là : le volcan Rincon de la Vieja, à 25 kilomètres au nord de Liberia, puis Playa Pan de Azucar sur la côte Pacifique, Monteverde, capitale de l'écotourisme, le parc national Manuel Antonio à proximité de Quepos, et finalement San José. La route interaméricaine qui traverse le Costa Rica du nord au sud s'étire sur 534 kilomètres. Si cette autoroute est dans l'ensemble en bon état, les chemins secondaires, eux, ne sont pas toujours asphaltés et par grosse pluie deviennent facilement des sentiers boueux, raboteux, inondés. Une voiture style jeep est donc indispensable pour qui souhaite accéder à des coins reculés ou voyager pendant la saison des pluies. Le Costa Rica, destination soleil ? Oui, mais pas forcément. Nous y étions en mai, au début de la saison des pluies qui se poursuit jusqu'en novembre. Dieu qu'il a plu ! Et après ? La pluie est chaude. Là, on vit sous son parapluie, on ne craint pas de se faire mouiller, on vaque à ses occupations comme si de rien n'était. Souvent, on est trempé jusqu'aux os. Un aspect positif à cela : c'est la période de reproduction des animaux. Ces derniers demeurent donc à proximité de leur nid, ce qui permet de les observer. Ainsi, nous avons eu la chance de voir dans un parc national un employé tenter de sauver un bébé toucan tombé de son nid ; il lui donnait patiemment la becquée avec des gallo pinto (mélange de riz et de fèves), le mets national des Ticos. S'il y a un volcan à ne pas manquer, c'est bien l'Arenal. Avec ses 1633 mètres d'altitude, la tête dans les nuages, il est l'image parfaite qu'on se fait du volcan typique, fumerolles et grondements inclus. Il crache du feu et à l'occasion on peut observer les coulées de lave. Un spectacle qui laisse une profonde impression. Le parc national Rincon de la Vieja est l'un des plus beaux du Costa Rica avec ses paysages magnifiques, ses eaux thermales et ses chutes spectaculaires où la baignade est délicieuse. Au sommet du volcan, le brouillard et la pluie ne nous laisseront rien contempler de ses neuf cratères. En revanche, une randonnée en boucle de trois kilomètres sur le sentier Pailas nous a permis d'admirer fumerolles, bassins de boue bouillonnante, marmites de vase ainsi qu'un volcan miniature de boue appelé volcancito. De Liberia, nous filons sur la côte Pacifique, à 35 kilomètres à l'ouest de la capitale de la province du Guanacaste. La route mène à Filadelphia, Belen et enfin Brasilito, petit hameau authentique habité essentiellement par les Ticos. De là, les amateurs de surf prendront la direction de la Playa Tamarindo et les amoureux de la nature celle de la Playa Grande pour y observer la tortue luth qui vient y pondre ses oeufs. Cette tortue géante pond une centaine d'oeufs dans un trou de 70 centimètres de profondeur, qu'elle creuse elle-même à l'aide de ses pattes avant et recouvre ensuite de sable, puis regagne la mer. Il faut compter 68 jours d'incubation. Trois autres espèces de tortues fréquentent le Costa Rica : la Ridley, la Hawksbill et la tortue verte du Pacifique. Là encore, sur la côte Pacifique, la biodiversité est surprenante, surtout dans le parc Manuel Antonio, à sept kilomètres de Quepos. Ratons laveurs, coatis, agoutis, iguanes, paresseux, singes sagouins, singes capucins et singes hurleurs se partagent le territoire. Et les touristes ne les effraient aucunement. Gare à vos paniers à pique-nique ! En arrivant à Guaitil, petit village d'artistes spécialisés dans la confection de poteries, il pleut des trombes. Mario, l'un des artistes installés autour de la place centrale, nous salue de la main et nous invite à entrer dans son atelier. L'homme d'origine chorotega, la plus importante tribu indienne du Costa Rica, alimente sans cesse son four à bois où cuisent quelques poteries. Les braises servent aussi à faire griller la viande du repas du midi. L'odeur est irrésistible ! Les Choretegas, ou « peuple qui fuit », originaires du Sud mexicain, auraient appartenu à une civilisation centre-américaine antérieure aux Mayas. Établis depuis le IXe siècle sur la côte Pacifique, l'actuelle province du Guanacaste, les Indiens choretegas continuent de pratiquer leur art d'inspiration mexicaine. Un voyage au Costa Rica serait incomplet sans un détour à Monteverde, quoique la route de terre qui y grimpe soit éprouvante : une ascension de trois heures entre ciel et terre. Les paysages rappellent la Suisse, on y fabrique même du fromage. Une initiative de la communauté quaker qui vit là depuis 1951. C'est l'abolition du service militaire, en 1948, qui les aurait conduits dans ce coin reculé du Costa Rica. Monteverde, c'est La Mecque des écologistes : on y découvre tous les secrets de la forêt tropicale, de jour comme de nuit. La petite ville foisonne d'auberges et de restaurants à l'enseigne écologique. On mange bien, le café est bon, il y a de l'ambiance. C'est la pura vida ! En vrac - Il existe deux saisons au pays : la saison sèche, qui s'étend de décembre à avril, et la saison des pluies, qui dure de mai à novembre. - Les cartes de crédit sont généralement acceptées dans les hôtels et les restaurants et les guichets automatiques de la banque Banco Popular, situés dans les grands centres, acceptent les cartes de débit canadiennes. Attention ! Les Ticos peuvent refuser des billets déchirés ou froissés. La devise du pays est le colon.

  • Jamaïque - Au pays de Marley en tout-compris

    Il existe deux Jamaïque: celle des grands hôtels pleins d'étoiles où l'on se fait dorloter par les gens de la place et celle de l'arrière-pays où l'on se gâte en allant librement à la découverte du peuple. Peu importe la formule, la Jamaïque révélera son âme à ceux qui sauront l'écouter et s'efforceront de l'atteindre. D'Ocho Rios à Négril, une invitation à communier avec l'humour, l'aventure, la beauté, la musique. Yeaaah man! Montego Bay — «Lady, don't worry, please don't worry. Let's meet some special place, some special time of day. Only in Montego Bay, only Montego Bay... » Dans le hall d'entrée du Sunset Beach Resort & Spa, un employé de l'hôtel balaie le carrelage au rythme d'un reggae endiablé. «Yeaaah man! C'est Sweet Life, du chanteur Cocoa Tea, lance en patois l'homme au sourire fendu jusqu'aux oreilles. Adolescent, il chantait dans les églises. On peut trouver ses CD à Montego Bay, chez Top Ranking ou El Paso.» Montego Bay? Mais comment y aller? À pied, c'est trop loin. La navette de l'hôtel? Oui, sauf que l'aller-retour «magasinage» en après-midi se limite au grand marché artisanal et à la Gloucester Avenue, deux paradis touristiques bouffeurs de dollars. Décidément, on ne s'en sort pas. Et le chauffeur qui apparemment ne quitte pas d'un poil ses passagers. Non! Aller à Montego Bay sans prendre le temps de vivre un peu l'ambiance de l'ancien port de bananes et de sucre aujourd'hui fréquenté par les bateaux de croisière; sans parcourir la ville au rythme du reggae diffusé par des murs aux enceintes géantes; sans regarder les hommes jouer aux dominos sur le trottoir ou derrière les étals colorés de fruits et de légumes; sans visiter le Civic Center, seul musée de la ville... c'est comme de manger une Caramilk sans caramel! On en dit beaucoup sur le pays de Bob Marley. Qu'il est dangereux. Qu'il est pauvre. Que la drogue y circule en grande quantité. Et que Montego Bay, malgré son titre de capitale touristique, ne fait pas exception à la règle. Il faut admettre qu'un simple coup d'oeil sur l'agglomération de 120 000 habitants permet de conclure à une histoire de brouhaha populaire sur fond d'un quotidien pas toujours facile. Il reste donc conseillé d'être accompagné d'un guide, du moins pour la première fois, question de se familiariser avec les us et coutumes des autochtones. C'est Philipp, un des chauffeurs de taxi attitrés à l'hôtel, qui va m'initier à Montego Bay. «La Jamaïque a été un prix de consolation pour les Anglais lorsqu'ils ont perdu Hispanolia aux mains des Espagnols en 1655, explique le Jamaïcain. Mal protégée, l'île a été prise d'assaut sans trop de résistance. Luckily for the Brits, qui ne revenaient pas chez eux les mains vides.» De la jungle noctambule des boîtes chaudes de Mo Bay au rythme grave et lourd des sound systems dans les ghettos, partout l'ambiance est captivante. Qui, mieux qu'un chauffeur de taxi, peut parler de cette île qui détient le record du nombre de bars et d'églises par personne et dont la bauxite et l'alumine constituent les plus importants produits d'exportation? Fier comme Artaban de la culture de son pays, il va jusqu'à arrêter sa voiture sur le bord de la route pour cueillir une plante et me donner un cours sur son utilisation en cuisine ou en médecine. D'anciennes maisons de planteurs sont devenues des musées très courus, telle la Rose Hall Great House, à 11 kilomètres à l'est de Montego Bay, une imposante demeure en pierre restaurée dans les années 1960 et certainement la plus visitée des fastueuses demeures de maîtres de plantation de canne à sucre en Jamaïque. Est-ce pour son architecture coloniale que les touristes s'y rendent en grand nombre, ou pour se convaincre de l'existence d'Annie Palmer, la sorcière blanche de Rose Hall qui aurait tué trois de ses maris et plusieurs de ses amants esclaves? On dit que son fantôme hante toujours la demeure. Xamayca, ou «terre de bois et d'eau»: ainsi les Arawaks nommaient-ils leur île, la troisième plus grande des Caraïbes après Cuba et Haïti. D'une superficie totale de 10 991 kilomètres carrés, ce pays de mer et de montagne qui s'étend d'est en ouest sur environ 250 kilomètres, sa largeur maximale ne dépassant pas 80 kilomètres, jouit de la générosité d'un climat tropical. Cricket à l'honneur En temps normal, du Donald Sangster International Airport à Montego Bay jusqu'à Ocho Rios (Ochi pour les intimes), il faut compter une heure et demie. Sauf que, depuis le début des travaux d'agrandissement de la fameuse route côtière A1 en prévision de la Coupe du monde de cricket, accéder aux terres d'Ochi en moins de deux heures relève du miracle. Très attendu dans le monde anglophone, l'événement sportif qui se tiendra en mars et avril prochains dans plusieurs États de la Caraïbe, dont la Grenade, le Guyana, Saint-Kitts-et-Nevis et Sainte-Lucie, devrait attirer des milliers de spectateurs. La cérémonie d'ouverture aura lieu le 11 mars en Jamaïque et la finale, le 28 avril à la Barbade. Au total, 16 équipes s'affronteront. La Coupe du monde de cricket est le troisième événement sportif en importance dans le monde. La Jamaïque s'attend à une saturation de son réseau hôtelier et des liaisons aériennes entre les îles. Dans leur livre 25 Destinations soleil pour les vacances, Lio Kiefer et Isabelle Chagnon conseillent la location d'une voiture à Ocho Rios pour profiter de l'environnement. De l'ancien village de pêcheurs devenu terre vacancière, les excursions dans l'arrière-pays sont nombreuses: Turtle River Park, les jardins de Coyaba, Enchanted Garden et Shaw Park Gardens. Le seul hic d'avoir une voiture au royaume des tout-compris: la conduite à gauche. Si les routes côtières sont dans un état acceptable, les petits chemins intérieurs, étroits, sinueux et mal entretenus sont parfois dangereux. Un feu rouge est une «suggestion» d'arrêt et la limite de vitesse... so what! Les Jamaïcains conduisent très vite. Un conseil d'amie: s'abstenir de sortir la nuit. À Prospect Plantation, Vincent Taylor, le guide qui accompagne les touristes dans les plantations de bananes, d'ananas, de piments et de café, est un pince-sans-rire comme beaucoup de Jamaïcains. Une sorte d'humour très... british. Trois minutes après le départ, le tracteur qui tire la grande carriole dans laquelle nous prenons place s'immobilise. «Oh Lord, we are out of gaz!, s'exclame Taylor. I have to go back to get some. I'll come back in five minutes.» Fallait voir les réactions de chacun! J'avoue qu'il nous a bien eus. Et ce ne sera pas la dernière fois. Écolos avant l'heure Près d'Ocho Rios, dans le petit hameau de montagne Nine Miles, naissait le 6 février 1945 Robert Nesta Marley, Métis de père blanc capitaine de l'armée britannique et de mère noire jamaïcaine. «Wake up and live!» La quête de Bob Marley et de ses amis rastas contribuera à la renommée de l'île. Le Nine Mile Museum raconte la vie du chanteur de reggae. Bob Marley est mort en 1981 mais, depuis, il est resté un dieu vivant respecté de tous. Sur l'île, la communauté rasta est minoritaire mais non sans influence. Le nom dérive de Ras Tafari, le Négus Negast d'Éthiopie. Quant au mouvement rastafari, il a vu le jour dans les années 1930 à l'initiative de Marcus Mosiah Garvey, qui préconise une doctrine nationaliste noire et radicale souhaitant l'unification des Noirs du monde entier. Du coup, l'Éthiopie, seul pays d'Afrique à avoir toujours préservé son indépendance, devient un symbole de l'émancipation des Noirs. Aujourd'hui, la majorité des rastas vivent de leur foi. Ils partagent le dogme du régime i-tal, végétarien, parfois végétalien et sans sel ajouté, refusent de manger toute nourriture non biologique, de consommer de l'alcool, de se couper les cheveux et de se les peigner (d'où les dreadlocks). Ils prennent de la ganja, ou chanvre, une herbe biblique dont la consommation est un sacrement. Yeah man, go West! Une approche par la mer en catamaran permet de découvrir au détour des criques les petits villages colorés de pêcheurs. Négril est définitivement la carte postale de la Jamaïque. Quant à Black River, situé à quelques kilomètres au sud de Négril, on garde le souvenir d'un village authentique parsemé de petites et de grandes maisons coloniales et de la rencontre avec Peter, Little George, Marguerite et Little Tom, les crocodiles de la rivière Black River. La moindre demande de renseignement peut dégonfler l'agressivité, se transformer en invitation à boire un café ou à engager la conversation. Sur la plage de Long Bay, en attendant le bateau qui nous conduira en mer, reggae, rhum, baignade et sauts de falaise au programme, un rasta me demande d'où je viens et m'invite à commenter ses peintures. Il s'appelle Ras Ramon, se dit peintre et professeur en art. Un peu douteux, c'est vrai! Mais ce qui saute aux yeux, c'est le plaisir avec lequel il m'explique la signification de chacun de ses dessins. Il ne veut pas d'argent, seulement un peu d'attention et une bonne parole sur lui à mon retour. Le meilleur café du monde, le plus cher du moins, est cultivé sur les pentes des Blue Mountains, au sud-est de l'île. Nous ne verrons pas les plantations mais nous dégusterons l'élixir très prisé des Japonais. Comme nous goûterons au jerk chicken, aux patties et à l'ackee. Dans un forfait tout-compris, si on se donne la peine de garder l'oeil ouvert, on remarque que l'authentique persiste dans l'architecture, la gastronomie, la musique. Et qu'en étant attentif aux remarques et aux interventions des employés de l'établissement, on peut très bien découvrir le pays dans un hôtel. Utile pour qui a des fourmis dans les jambes. Yeaaaaaah, man! En vrac - À rapporter: musique, café et rhum. - Langues parlées: l'anglais et le patois. - Le climat est tropical humide, avec peu de variations de température. Le nord et le nord-est sont les régions les plus arrosées. Le sud est beaucoup plus sec et offre des paysages quasi désertiques où poussent de beaux cactus. On ne privilégie pas de saison, ou alors entre novembre et avril. Les risques d'ouragans sont plus élevés entre septembre et octobre. - Mieux vaut demander la permission avant de prendre une photo. - Le taxi est un mode de transport intéressant et simple. Il se révèle un bon moyen de découvrir le pays et est accessible dans tous les hôtels et resorts de l'ile. Vérifier toutefois la plaque d'immatriculation du véhicule. Elle doit montrer le signe rouge PPV (Public Passenger Vehicle). Et entendez-vous sur un tarif avant le départ! Une excursion d'environ trois heures (les chauffeurs ne compteront pas à la minute près si vous êtes sympathique) coûtera entre 40 et 50 $ US. Montrez-vous curieux, les chauffeurs jamaïcains n'en seront que plus contents. - La Jamaïque est un pays de très fortes contradictions: il importe donc de se documenter le mieux possible sur la culture et les habitudes locales avant de s'y rendre. Les gens y sont très fiers. - Renseignements: Louise Paquette, représentante de la Jamaïque au Québec, Tél: 450 928-9859, www.visitjamaica.com. Publié dans le Devoir du 3 février 2007

  • Maroc - Échappée berbère dans le Haut-Atlas

    Publié dans le Devoir du 2 novembre 2013 Tzigui — Partout, des ksour (forteresses) et des casbahs (forts) sur de hauts plateaux hérissés de mesas rougeoyantes et rainés de gorges et de vallées étonnantes où nichent des oasis. Falaises vertigineuses, sable, roches, ruines, tout est ocre à perte de vue. Puis se détache une touffe verte dans une mer de beige : c’est la palmeraie de Tinghir, l’une des plus belles au royaume du Maroc. Bienvenue dans la vallée du Todra, porte d’entrée du Haut-Atlas. Une quinzaine de kilomètres séparent la ville de Tinghir du village de Tizgui, dernier de la série des agglomérations le long de la palmeraie de Tinghir. Après, surgissent les fameuses gorges du Todra. Ici, l’esprit berbère des montagnes prédomine : fierté et accueil chaleureux. Et une sagesse aussi vaste que le Moyen-Atlas, le Haut-Atlas et l’Anti- Atlas réunis. J’avais déjà traversé la vallée du Todra lors d’un précédent voyage, et gardé en mémoire les hautes falaises de calcaire rose tombant à pic dans l’oued Todra. Mais, comme la plupart des touristes qui voyagent au Maroc, je n’avais fait que passer dans ce Far-West hallucinant, en route vers les villes impériales : Fès, Rabat, Meknès au nord, Marrakech à l’ouest. Je m’étais promis de revenir dans ce « Grand Canyon marocain ». Pour passer quel ques jours dans l’univers abrupt, déchiqueté et aride des rochers aux formes bigarrées et aux couleurs gorge-de-pigeon, selon la position du soleil. Pour flâner dans les ruelles des casbahs, siroter un thé sucré au miel parmi les Berbères du Haut-Atlas, marchander quel ques tapis… Nous sommes le 10 mars 2963 d’après le calendrier amazigh ; le 10 mars 2013 selon le calendrier grégorien. « Le calendrier amazigh est le calendrier agraire utilisé par les Berbères, explique Mohammed, notre guide. “ Yennayer ” correspond au premier jour de janvier du calendrier julien, qui est décalé de 13 jours par rapport au grégorien, soit le 13 janvier de chaque année. L’an 0 correspond à l’an 950 avant J.-C. » Nous sommes donc en 2963. Oui, les Berbères sont fiers. Dans leur discours, ils nous rappellent qu’ils furent les premiers habitants du Maghreb. Depuis dix ans, leurs revendications identitaires connaissent un foisonnement culturel avec le soutien du roi Mohammed VI, lui-même d’origine berbère. Il y a deux ans, le monarque a consacré le langage berbère « tamazight » seconde langue nationale après l’arabe. Il a également réhabilité, en 2003, le « tifinagh », un ancien alphabet utilisé par les Touaregs. « Une version modernisée de cet alphabet est d’ailleurs enseignée maintenant dans certaines écoles du Maroc comme écriture berbère de référence », explique Mohammed. L’image romanesque populaire dépeint le Berbère com me un nomade qui traverse le désert à dos de chameau et qui dort sous la tente. Pas seulement ! En fait, on le rencontre partout. À Fès, Marrakech, Casa blan ca, Rabat… Et ailleurs dans le monde. Il vit majoritairement dans les grandes villes et exerce aussi bien le métier d’avocat, de médecin, d’entrepreneur ou de commerçant, que celui d’agriculteur en campagne, d’éleveur de moutons et de chèvres sur les sentiers des Atlas… Les Berbères représentent plus de 40 % de la population du Maroc, estimée à un peu plus de 32 millions d’habitants. « Mais l’identité des Berbères urbains s’est beaucoup diluée avec l’exode rural, et la langue est en perte de vitesse malgré son apparition au programme des écoles et de certaines universités », écrit Thierry Oberlé dans Le Figaro.fr. C’est au hasard que nous avons choisi de loger au Dar Ayour. Sur le Web, la maison d’hôte située à Tizgui s’affiche comme riad. Et on con naît le charme fou de ces maisons où bois peint, cuivre, tapis, coussins, banquet tes et lumière tamisée se mélangent pour donner naissance à un univers ensorcelant, di gne d’un conte des mille et une nuits. Ambiance feutrée garantie ! Et puis, c’est pratique, Tizgui étant à un kilomètre de marche des immenses murs de pierre hauts de 300 mètres, où l’humain ressemble à une toute petite fourmi. Dans sa partie la plus spectaculaire, le passage routier fait à peine dix mètres. Du ciel, on ne voit qu’une étroite bande. Les rives de l’oued Todra, qui serpente le long de la route escarpée, comporte des sentiers pour les randonneurs de tous les niveaux et pour les grimpeurs. Hallucinant ! « C’est au fond de ces gorges que coule la source aux poissons sacrés, une source d’eau chaude où vivent des poissons que nul n’a le droit de pêcher, explique Mohammed. Et ici, c’est la source des femmes stériles. Selon la tradition, son eau guérirait les femmes infécondes. » Le Dar Ayour accueille ses clients selon la tradition berbère : thé à la menthe, petits gâteaux, amandes… On se sent tout de suite bien dans ce gîte. Pas le grand luxe, mais joli, propret, et un personnel intentionné. La maison dispose de 14 chambres avec vue sur l’oued, la montagne et les jardins où poussent palmiers, figuiers, amandiers, oliviers, grenadiers… « Je suis né dans la casbah en bas de la route, explique Adnan, le propriétaire. Avant d’ouvrir le Dar Ayour, en 2007, j’ai travaillé à La Fantasia de Marrakech, au restaurant Il mare d’Essaouira et à l’hôtel La Vallée de Ouarzazate. C’est aussi dans cette dernière ville [une étape touristique bien connue], à l’école hôtelière, que j’ai fait mes études en tourisme. » Le Dar Ayour est une entreprise familiale berbère. Il y a Françoise, Mohammed, Houssaine, Slinane et les autres… On y offre une vaste gamme de services pour vraiment faciliter la vie des visiteurs : accueil à l’aéroport de Ouarzazate (à 160 kilomètres) ou à celui de Marrakech, repas, cours de peinture, randonnées en montagne ou dans les palmeraies, balades à cheval, excursions dans les gorges du Dadès, dans la vallée des mille casbahs et dans le désert. Et, sur place, il y a la balade à pied d’une quinzaine de kilomètres dans la palmeraie de Tinghir, qui mène en trois ou quatre heures à Tinghir. On y apprend tout sur les méthodes d’irrigation de ce jardin d’éden et on en revient en sueur, mais la tête pleine de souvenirs. À Tizgui, une coopérative de femmes perpétue la fabrication artisanale de tapis berbères. Bien sûr, les gens sont conviés à leur rendre visite, mais rien ne les oblige à acheter. Rien à voir avec le marchand de tapis des souks qui, « pour le plaisir des yeux », emmène sa « proie » à l’arrière de son échoppe et offre à profusion du thé à la menthe pendant qu’il étale sur le plancher sa centaine de tapis, dont on ne connaît souvent rien de leur fabrication ou de leur provenance. « Seules les femmes fabriquent les tapis, seuls les hommes les commercialisent », explique Ammed. Il faut trois mois pour en tisser un. Le métier nomade est vertical et donne un tapis à un seul côté frangé. Les couleurs traditionnelles sont faites à partir de végétaux : le safran pour le jaune, l’indigo pour le bleu, le coquelicot, la garance, le henné, la cochenille pour le rouge. » Les motifs des tapis berbères représentent la vie, les traditions, les croyances… Le scarabée est le symbole de la protection contre le mauvais oeil ; les losanges désignent les quatre points cardinaux ; la fibule, symbole amazigh, est une arme ; les dromadaires incarnent la dot et le moyen de chercher une nouvelle vie. La pyramide évoque la maison, le douar ou la grande tente avec les trois générations sous le même toit : parents, fils, belles-filles et petits-enfants. Les Berbères de la région de Tinghir sont particulièrement accueillants : un sens de l’hospitalité légendaire et une sagesse aussi vaste que le Moyen-Atlas, le Haut-Atlas et l’Anti-Atlas réunis. Si la majorité vivent dans les villes, plusieurs continuent de perpétuer un nomadisme pastoral traditionnel autour de la tente en poils de chèvre. Comme Hammo, ses enfants et ses petits-enfants, dont le modeste campement est installé au-dessus de Tizgui et de ses palmeraies. Une boucle de trois heures permet de se rendre à ce campement. Mieux vaut entreprendre cette marche avec un guide, et le matin, lorsque le soleil éclaire le fond des gorges qui prennent un éclat doré. Vraiment photogénique ! À l’entrée des gorges, des grimpeurs se lancent à l’assaut du pilier du Couchant, haut lieu d’escalade pour les plus aguerris. Un peu plus loin, là où commence la randonnée, la Petite Gorge offre des voies plus courtes qui conviennent mieux aux débutants. Le sentier de randonnée, emprunté par des ânes et des mules, est assez bien tracé et évolue tout en hauteur dans un paysage montagneux de roche et de sable. Pas beaucoup de verdure ici. Rien de très difficile, mais il faut tout de même de bons souliers. Et du souffle. L’hospitalité est sacrée ici ; on ne refuse pas une invitation à boire le thé, c’est une insulte, et on n’est pas trop regardant sur l’éclat des verres… L’eau se fait rare dans ces montagnes arides. C’est en compagnie de Hammo, le papa aux yeux et au turban bleus, de son fils Joseph et d’Abiscia, sa petite-fille, que nous prenons le thé au thym. Hammo élève des chèvres. C’est un nomade. Sa famille vit modestement dans une tente en poils de chèvre. Il ne parle pas le français. Quelques secondes d’émotion au terme de quatre heures de marche en montagne. Un moment intime difficile à décrire, mais qui va s’inscrire durablement dans la mémoire. Comme l’image de ce cortège funèbre en route vers le marché de Tinghir. Que des hommes. « C’est eux qui accompagnent le mort au cimetière, les femmes restent entre elles à la maison », dit Mohamed. À Tinghir, il y a le marché des femmes et celui des hommes. Puis une foule de petites boutiques isolées dont on ne devine pas l’existence. Un guide est apprécié. Pour comprendre! En vrac Se rendre au Maroc. Un vol direct assure la liaison Montréal-Casablanca sur les ailes de Royal Air Maroc. L’aéroport Mohammed-V offre une panoplie de loueurs d’autos pour qui parcourt le Maroc en autonomie. Sinon, des vols vers Marrakech ou Ouarzazate y sont proposés régulièrement. Aussi, Transat Découvertes, qui vise l’authenticité et le voyage « autrement », offre quatre itinéraires marocains pour 2014. Organiser son voyage. Plusieurs voyagistes proposent le Maroc à leur programme. Comme Sultana Tours, par exemple, qui offre des parcours classiques comme « Le grand tour du Maroc », « Les villes impériales », « Le grand sud et les casbahs », « Escapade désert et randonnée berbère entre Marrakech et Zagora via Ouarzazate ». Mais, encore plus authentique et hors des sentiers battus, le voyagiste Karavaniers propose de belles randonnées pédestres aussi bien dans le désert que dans les Atlas. Là où peu de gens vont. Ces randonnées muletières s’adressent à tout le monde, y compris les familles avec enfants. Les treks sont organisés en fonction des saisons : l’hiver dans le désert, l’été dans l’Atlas. Si, en général, chez Karavaniers, les randonnées sont de niveaux 1 à 5, elles ne dépassent pas 3 au Maroc. Un mulet sera mis à la disposition des familles avec un enfant de deux ou trois ans. On se rend dans les vallées reculées, on prend le temps d’observer, de regarder vivre l’autre. Rien n’est écrit d’avance, rien n’est commandé, les guides provoquent les rencontres, qui ne seront jamais les mêmes. Voilà de la randonnée qui revêt une dimension humaine et qui s’adresse à tous. Pour en savoir plus : Christine Plaisant, chez Karavaniers. Où dormir dans les orges du Todra. Le Dar Ayour est certainement une bonne adresse. En plus de nombreux services, on y propose mille et une activités qui permettent aux voyageurs d’entrer en communication avec les gens du pays. Ainsi, on vous parlera danse, musique et coutumes. Tous les repas sont pris dans un joli salon à l’ambiance feutrée, ou dehors sur la terrasse, face à la montagne, aux jardins et à l’oued de Todra. Visiter Tinghir, son marché et sa casbah en ruines, mais aussi, à proximité, les gorges du Dadès et la palmeraie de Skoura, classée au patrimoine de l’UNESCO. Goûter au tagine, une spécialité bien berbère devenue emblème de la cuisine marocaine. Il s’agit d’un plat de viande, de poisson ou de légumes cuit à l’étouffée et délicieusement parfumé. Le tagine est aussi le contenant en terre surmonté d’un couvercle conique dans lequel le mets cuit de façon traditionnelle. Habituellement, il est placé sur un brasero dont on entretient les braises au fur et à mesure, pour une diffusion régulière de la chaleur. Renseignements : Office national marocain du tourisme, 1800, rue McGill College, Montréal, 514 842-8111.

  • La Beauce à vélo - Réinventer la roue

    La Saint-Jean marque le début des vacances et des activités estivales partout au Québec. Le moment est propice pour se mettre en selle et fêter le solstice d'été à la campagne. Enfourchons nos vélos et profitons de ces trois jours de congé pour découvrir, à 100 kilomètres au sud de Québec, la Beauce et les Etchemins, jolie contrée forgée depuis 400 ans par des «patenteux, des entêtés et des ingénieux». Un bon exemple: le nouveau circuit «Vélo Villages», aussi connu sous l'appellation «Le Montagnard», un itinéraire balisé de 250 kilomètres qui relie 17 villages de la Beauce et des Etchemins, la plupart perchés au sommet d'une montagne. Un tracé sur route secondaire qui ne s'adresse ni aux néophytes ni aux jeunes enfants. Des villages qui se gagnent en bonne suée cycliste, avec des panoramas parfois époustouflants. Mollets mous s'abstenir! En 2003, le Centre local de développement (CLD) des Etchemins organisait un voyage agrotouristique dans le Massif central, en France. «On a remarqué que les villages étaient reliés par des sentiers pédestres et que chacun avait sa spécialité», raconte Suzanne Turgeon, présidente de Tourisme Chaudière-Appalaches et responsable des communications au CLD des Etchemins. «Dans l'un d'eux, on fabriquait des couteaux; dans l'autre, on élevait des moutons... » Afin de créer une synergie entre ces différents villages, des intervenants en développement touristique ont mis sur pied «Rando Plume», une formule comprenant nuitée à l'hôtel, souper et petit-déjeuner. «L'idée, charmante et sans prétention, nous a tout de suite plu, et nous avons décidé d'élaborer un concept semblable dans notre région», ajoute Mme Turgeon, qui trouve que le Massif central ressemble aux Appalaches. Par monts et par vaux De Saint-Simon-les-Mines, la pente est forte pour atteindre le village de Saint-Benjamin, prélude à ce qui nous attend au cours des deux prochains jours. Les Appalaches, ce n'est ni le Gothard ni le mont Blanc, mais ça se respecte. La mise en jambes est assurée! À Saint-Benjamin, on raconte que «pour s'offrir un nouveau tabernacle, on fit appel aux jeunes de la paroisse. Chaque fois qu'ils sacraient, ils devaient mettre une obole dans le tabernacle déposé dans un lieu public du village pour l'occasion. Il semble que l'église n'eut pas à attendre longtemps le nouvel ornement». Onze des treize villages traversés dans les Etchemins sont perchés au sommet d'une montagne. Chacun a son église et sa petite histoire. On apprend qu'à Sainte-Justine, les trappistes ont donné le coup d'envoi à la colonisation et qu'une visite guidée de l'ancien monastère permet de découvrir leur mode de vie. Que Lac-Etchemin abrite le centre eucharistique et marial Spiri-Maria, qui donne à la région une allure de terre sainte, et qu'à Saint-Magloire vivaient les frères Baillargeon, Jean, Paul, Adrien, Lionel, Charles et Antonio, la famille de lutteurs la plus forte au monde. Un musée situé dans le Café Bistro raconte leur histoire de 1947 à 1976. Sécurité et liberté Le circuit «Vélo Villages» (ou «Le Montagnard») a la particularité d'offrir tout au long de son parcours des trousses de réparation en cas de bris mineurs. Sur la carte, dix sites sont désignés «Halte secours»: Saint-Georges, Saint-Benjamin, Lac-Etchemin, Saint-Luc-de-Bellechasse, Saint-Magloire, Sainte-Justine, Saint-Cyprien, Saint-Louis-de-Gonzague, Saint-Prosper et Saint-Zacharie. Ces haltes se trouvent au dépanneur ou au magasin général des villages. Dans l'éventualité d'un pépin plus sérieux, des vélos sont disponibles pour terminer le parcours. À la condition, bien sûr, d'avoir pris un forfait week-end. On vous apporte alors la bicyclette de rechange sur le lieu du bris et on se charge de transporter votre vélo brisé au point de départ. À la manière de la CAA, un coup de téléphone et vous êtes dépanné! On assure aussi le transport des bagages d'un site d'hébergement à l'autre. Une dizaine d'auberges, de gîtes et de manoirs ponctuent le parcours. Le point de départ se trouve à Saint-Georges. On gare la voiture dans le stationnement du Georgesville, puis on récupère la carte du circuit «Vélo Villages» au comptoir de réservation de l'hôtel. On en profite pour réserver le prochain hébergement et convenir du transport des bagages. Un préposé nous explique la marche à suivre. L'aventure peut également commencer par un massage (sur réservation) au centre de spa de l'hôtel, question de distiller la future agression de nos corps plus habitués aux langueurs des siestes hivernales qu'au souffle régulier d'un coeur endurant. On ne se refait pas. Cette fois, ça y est, c'est un départ. Il faut compter au moins deux jours pour parcourir les 250 kilomètres, trois jours idéalement si on souhaite visiter les attraits touristiques recommandés en chemin, se baigner et assister aux activités de la Saint-Jean prévues dans les villages. Toutefois, rien ne vous empêche de ne parcourir qu'une fraction du circuit, de profiter de l'hébergement et de manger de bons petits plats plutôt que des kilomètres de vélo. Publié dans le Devoir du 22 juin 2007

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