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  • De la plaine au Pacifique en train

    De Calgary à Vancouver, le Rocky Mountaineer traverse six chaînes de montagnes, un désert en altitude, une forêt humide tempérée. Le train se faufile entre pics enneigés, glaciers, canyons, lacs et vallées, empruntant tunnels et viaducs, longeant fleuve et rivières. Mille kilomètres d'histoire et de paysages grandioses, que le train parcourt à une vitesse moyenne de 50 km/h. Deux journées de bonheur pour le plaisir des yeux et du palais. Banff — Une ombre a bougé derrière un arbre. Un grizzly? À moins que ce soit mon imagination aiguisée par la lente progression du train entre les escarpements rocheux et les forêts de pins, le long de rivières turquoise, au beau milieu d'une symphonie minérale de pics et de rocs où coulent des chutes fougueuses? En 12 heures, on passe de la plaine à la montagne et au désert. Quel incroyable panorama! À ne plus savoir où donner du regard. Par ici, le mont Castle, à 2730 mètres, dont la forme rappelle celle d'un château avec ses tourelles crénelées. Par là, la petite gare en bois du lac Louise, l'une des 12 gares ferroviaires inscrites au patrimoine culturel canadien. On ne voit pas le lac turquoise mais on aperçoit le sommet du mont Victoria. La ligne de chemin de fer est un musée à ciel ouvert. Mais ici, c'est la nature qui raconte l'histoire. Chaque montagne, chaque lac, chaque chute, chaque glacier porte le nom d'un explorateur, d'un géologue, d'un trappeur, d'un prospecteur qui a contribué au développement de la région. La royauté britannique a aussi eu sa part du gâteau. Par exemple, le lac Louise, jadis le lac Émeraude, a été baptisé en l'honneur d'une des filles de la reine Victoria, Louise Caroline Alberta. On devine que la province lui doit aussi son nom. Quant à la localité de Banff, connue des cheminots sous le nom de Siding 29, Lord Strathcona la renomma en 1880 d'après le comté de Banffshire, en Écosse, d'où il était natif. Entre autres services à bord du Rocky, le vacancier a droit tout au long du parcours à des commentaires instructifs sur la géologie, la faune et la flore. Plus que dix kilomètres avant d'atteindre la petite ville de Stephen, où se situe la ligne de partage des eaux et la frontière entre le parc national de Banff, en Alberta, et celui de Yoho, en Colombie-Britannique. À 1626 mètres d'altitude, Stephen est le point le plus élevé de cet itinéraire de deux jours. Dans une vingtaine de minutes, nous franchirons les tunnels en spirale. C'est ça, le circuit First Passage to the West à bord du Rocky Mountaineer! D'abord, une promenade en train dans l'Ouest canadien, au coeur de paysages à couper le souffle, puis une leçon d'histoire et de génie sur les traces du Canadien Pacifique, légendaire pour avoir réuni la Colombie-Britannique au Canada, il y a 125 ans. Et c'est une expérience gastronomique pour qui voyage en classe Goldleaf. Dans ce cas, on a droit aux repas chauds assis confortablement dans la salle à dîner située à l'étage inférieur du wagon de deux étages, muni d'un dôme de verre et de vitres surdimensionnées qui permettent d'apprécier le paysage en mode panoramique. Le voyageur a aussi le choix de monter à bord à Calgary ou à Banff. Par la suite, le train poursuit son chemin jusqu'à Vancouver avec comme unique arrêt une nuitée à Kamloops, à l'hôtel Thompson. En débutant le voyage à Banff, bien qu'on loupe l'entrée dans les Rocheuses, on a le plaisir de découvrir le fameux village de montagne de 7000 habitants qui accueille chaque année plus de 4,5 millions de touristes, ainsi que son parc national et les sources chaudes du mont Sulphur, à l'origine de la création, en 1885, du premier parc national canadien. «Puisque nous ne pouvons pas exporter les paysages, importons les touristes!» Tel était le but de l'Américain William Cornélius Van Horne, directeur général de la Canadian Pacific Railway, chargée, en 1881, de prolonger jusqu'au Pacifique la ligne de chemin de fer qui se terminait alors à Winnipeg. Relier le Canada d'un océan à l'autre fut une tâche colossale. Remplir le train, une autre. Un défi relevé par Van Horne qui, en plus de diriger la construction de lignes ferroviaires, fit construire des hôtels de luxe à l'allure de châteaux, tel le Banff Springs Hôtel, Château Lake Louise, Château Frontenac... maintenant propriété du groupe Fairmont. Et voilà les tunnels en spirale. Les voyageurs sont sur le qui-vive. On ne sait plus où donner de la tête. Puis, c'est le noir total pendant une vingtaine de minutes. Le temps pour le train de transpercer les mont Odgen et Cathedral, respectivement longs de 912,5 et 933 mètres, de s'entortiller deux fois sur lui-même tel un escargot et de traverser deux fois la rivière Kicking. «On a entrepris la construction des tunnels en 1907, explique l'agent de bord. Le souci: la "grande côte", un tronçon fortement incliné entre Field et Hector. Non seulement reconnue dangereuse, cette pente de 4,5 % d'inclinaison entraînait d'énormes frais d'entretien. La construction a duré vingt mois et fait appel à 1000 hommes. La pente fut réduite à 2,2 %.» Les émotions, ça donne de l'appétit: le personnel a prévu le coup et sert une collation composée de scones, de thé, café et jus. Le bar est ouvert en tout temps et l'ambiance est à la détenete. Il est 14h30 lorsqu'on passe à table, les yeux rivés sur le paysage. «On ne sert que des produits régionaux à bord», explique Frédéric Couton, chef exécutif du train, un Savoyard d'origine venu au pays il y a 28 ans. Au menu: du boeuf de l'Alberta, du poulet et de l'agneau de la vallée de Fraser, du saumon du Pacifique et du vin de la vallée de l'Okanagan. En tout cas, en longeant la rivière Eagle, rouge de saumons, on constate que le gros poisson migrateur abonde vraiment dans le coin. Nous suivons la rivière sur 48 kilomètres entre Sicamous et Three Valley Gap. C'est toutefois sous le pont de l'Eagle et durant les mois de septembre et octobre qu'on peut le mieux observer la fraie du saumon. D'un océan à l'autre Nous voilà à Craigellachie. C'est donc ici que fut enfoncé, le 7 novembre 1885, le dernier crampon de la voie ferrée du CP. Sur la petite plate-forme extérieure prévue pour prendre l'air, se délier les jambes et photographier tout ce qui défile sous nos yeux, on a l'impression d'entendre les cris de joie des spectateurs qui ont assisté à l'achèvement du premier chemin de fer transcanadien. Il aura fallu presque six ans. Un cairn marque l'emplacement de l'événement. À quelques minutes de la gare de Kamloops, un homme assis sur son balcon lève un toast à l'arrivée du train. Les enfants envoient la main. Décidément, ce train est une véritable curiosité. On se croirait maintenant en Arizona. Plus rien à voir avec les paysages de montagnes du début. Il y a belle lurette qu'on a quitté les montagnes Rocheuses, dès Palliser, sur la rivière Columbia. Depuis, nous avons traversé le col de Rogers, dans la chaîne Selkirk, qui reçoit tant de neige en hiver que les ingénieurs ont dû s'échiner à inventer des systèmes sophistiqués pour protéger la voie ferrée des avalanches: paravalanches, digues de déviation, tas freineurs... La neige n'est toutefois pas la raison qui empêche le Rocky Mountaineer de poursuivre ses activités en hiver. La politique du train panoramique est de ne voyager que le jour, de façon à ne rien manquer du paysage. Étant donné qu'en hiver les journées sont courtes, il serait impossible de compléter l'itinéraire de 1000 kilomètres en deux jours seulement. Le train roule en moyenne dix heures quotidiennement. Et en fonction du trafic ferroviaire, surtout près de Vancouver, il peut être considérablement retardé. Le train continue sa route vers Glacier, traverse dix fois la rivière Illecillewaet, passe par Revelstoke, dans la vallée du Columbia, et longe le lac Shuswaa. À Kamloops, tout le monde descend! Les vacanciers au départ de Calgary sont à bord depuis 12 heures. L'escale est appréciée. À l'hôtel Thompson, les bagages, on les retrouve dans la chambre. Après Kamloops, le train poursuit vers l'ouest, le long du fleuve Fraser. Avec ses 1368 kilomètres, le plus long cours d'eau en Colombie-Britannique s'étend sur près d'un quart de la province. Au sud de Quesnel commence le profond canyon creusé par le Fraser jusqu'à Hope, dans les monts Cascade. La petite ville est entourée sur trois côtés par de hautes montagnes. Puissant fleuve, le Fraser occupe une place spéciale dans l'histoire du chemin de fer canadien. C'est à Andrew Oderdonk, un entrepreneur en construction, que revint la tâche de construire le tronçon qui allait traverser le canyon du Fraser, lit-on dans The Rocky Mountaineer Mile Post. «L'homme d'affaires estime à 10 000 le nombre d'hommes nécessaire pour achever cette tâche. La Colombie-Britannique étant peu peuplée à la fin du XIXe siècle, il fait venir des travailleurs chinois de Californie. Ces derniers étaient expérimentés et parlaient l'anglais, puisqu'ils avaient travaillé à la construction de Union Pacific aux États-Unis. On fit aussi venir de Canton des hommes habitués à porter des charges lourdes. Des porteurs de thé, entre autres.» Bien que l'on utilisa foreuses mécaniques à vapeur, racleuses tirées par des chevaux et explosifs durant la construction, la presque totalité du travail se faisait à force de bras. «Les travailleurs chinois étaient payés un dollar par jour, une somme énorme comparativement au salaire quotidien de 0,07 sous en Chine. Mais, malheureusement, beaucoup de ces hommes moururent d'épuisement, de scorbut, de variole ou d'accidents dus à la mauvaise manutention des explosifs. Durant cette période, on a dénombré entre 10 000 et 15 000 travailleurs chinois.» Le Rocky Mountaineer propose quatre itinéraires dont trois sur deux jours qui incluent une nuitée d'hébergement en mi-parcours. «First Passage to the West», celui que nous effectuons entre Calgary et Vancouver; «Journey through the Clouds» entre Vancouver et Jasper via Kamloops, en Alberta avec deux points forts: le mont Robson, le plus haut sommet des Rocheuses canadiennes, et les chutes Pyramid; «Rainforest to Gold Rush» qui, via la forêt tempérée humide de la côte et le désert du canyon du fleuve Fraser, mène aux ranchs du Cariboo Gold Rush; et enfin «Whistler Sea to Sky Climb», un circuit de trois heures seulement au départ de Vancouver vers Whistler, pour qui souhaite découvrir la chaîne des montagnes côtières. En vrac À voir et à faire à Banff... Datant de 1895, le Banff Park Museum est le musée d'histoire naturelle le plus ancien de l'Ouest canadien. On peut voir tout la faune des Rockies empaillée. Un tour de gondole au sommet du mont Sulphur, à 2270 mètres. La vue sur les Rocheuses et la Bow River, couleur émeraude, est grandiose. Un petit sentier mène sur des passerelles de bois à une ancienne station météo. Une virée au lac Moraine pour voir la couleur de l'eau. Plus sauvage que le lac Louise. Ouvrir l'oeil pour le grizzly. Nous l'avons vu de la route, près de Banff, en train de manger des baies. En septembre, c'est la saison des petits fruits. Les chances sont bonnes de l'apercevoir. L'ours mange en moyenne 2000 baies par jour. Le Rocky Mountaineer est la plus grande entreprise ferroviaire privée en Amérique du Nord. Depuis 1990, plus d'un million de passagers provenant de tous les coins du monde ont découvert les Rocheuses et l'Ouest canadien à bord de ce train panoramique. Plus de 50 % des passagers proviennent de l'étranger, en particulier des Australiens, des Britanniques, des Américains et des Japonais. La moyenne d'âge se situe dans la cinquantaine. Deux classes sont offertes à bord du Rocky Mountaineer: Redleaf et Goldleaf. La première offre des repas froids servis aux sièges et la seconde, des repas chauds servis dans la salle à manger. Chaque wagon de cette classe de luxe compte également quatre personnes au service et à l'animation et trois à la cuisine. -Information: 1 877 460-3200, www.rockymountaineer.com/fr.

  • Estrie - Sur la Voie des pionniers

    À faire à pied, à vélo, en auto... Une vingtaine de silhouettes grandeur nature découpées dans un panneau d'acier Corten et plantées au beau milieu du paysage estrien, de part et d'autre de la vallée de la Coaticook. Un appareil audio inséré à chacune de ces structures et qui donne la parole à ces personnages ayant marqué la région à la fin du XIXe siècle, début du XXe siècle. Voilà une belle virée pour découvrir l'histoire, le patrimoine, les produits fermiers et les supers paysages de cette MRC. On en revient la glacière pleine à rebords et avec des amis/es. Sur le chemin Cochrane, à Compton, pas trop loin du cimetière du village, il suffit de cliquer sur un bouton, version française ou anglaise, pour que Matthew Henry Cochrane (1823-1903), homme d'affaires prospère, nous raconte avec fougue la façon dont il a marqué l'agriculture de Compton puis est devenu propriétaire d'une usine de chaussures à Montréal et d'un ranch en Alberta en plus de siéger au Sénat canadien. On est déjà sous le charme. Avec raison, car chaque personnage a été choisi avec soin par un groupe de citoyens du territoire et d'ailleurs, intéressés à l'histoire et au patrimoine. On a aussi fait appel à des étudiants en histoire de l'Université de Sherbrooke pour la recherche et la synthèse des informations. Finalement, c'est Anne Dansereau, auteure, comédienne et metteure en scène, qui a veillé à la conception finale des textes et à la supervision de la traduction et des enregistrements en studio. On poursuit jusqu'à Martinville. On clique sur le bouton et voilà qu'Oscar Lessard (1895-1964) se met à raconter aux promeneurs captivés comment il est devenu un homme d'affaires prospère. Dernier propriétaire du moulin et engagé dans sa communauté, il acquiert plusieurs commerces, construit des ponts et devient le premier président de la Caisse populaire de Martinville. Rencontre de plusieurs types Comme dans un roman, on découvre l'histoire au fil du chemin et des silhouettes plantées judicieusement dans le paysage. Rien ne vient obstruer le point de vue sur la campagne estrienne à travers ces personnages qui changeront de couleur au fil des saisons. Et en fonction de la météo. À Sainte-Edwidge-de-Clifton, on fait la connaissance du curé de la paroisse Wilfrid Morache (1856-1920); à Saint-Malo, de Georgianna Lizotte-Ouellet (1874-1950), sage femme, mère de 16 enfants et confidente des femmes; à Saint-Venant-de-Paquette, d'Hermine Malouin-Lefebvre (1841-1941), une centenaire qui a vu grandir la municipalité pendant quatre-vingts ans. Puis de Thomas Van Dyke à East Hereford; de Marie-Marthe Paquin-Crête (1923-2006) à Saint-Herménégilde; de Walter G. Belknap (1864-1940) à Coaticook (Baldwin Mills); de George Gale à Waterville; et de Daniel Way à Barnston-Ouest (Way's Mill). Autant d'hommes et de femmes, anglophones comme francophones, qui ont marqué la région au siècle dernier et bien avant. La clé des champs Et le plaisir ne s'arrête pas à la rencontre de ces personnages hauts en couleur qui redonnent vie à cette région bucolique des Cantons-de-l'Est, à une époque où industriels anglophones, éleveurs de bovins et producteurs laitiers viennent s'installer en grand nombre. D'ailleurs une journée ne suffit pas pour les découvrir tous. Car ici, tout est prétexte à regarder, toucher, goûter, écouter, échanger. En chemin, il y a des ponts couverts, des granges rondes, des églises, des jardins, des rivières et des animaux parfois bizarres, comme ces petits chevaux miniatures de la ferme Santschi, sur le chemin Kingscroft. Puis l'odorat se met en route, et là, c'est vraiment la fête. Que oui! Entre le pain maison, les fromages artisanaux, les confitures de cassis, les tartes aux pommes en cuisson et la bouse de vache, on ne sait plus où donner du nez. Pour plus de détails sur ce super parcours : http://www.voiedespionniers.com/

  • Israël - Sur les rives de la mer Morte

    La mer Morte recule d'au moins un mètre par année. Elle aurait perdu depuis une cinquantaine d'années un tiers de sa superficie. Les raisons de cet assèchement sont multiples. Entre autres, la surexploitation du Jourdain, le fleuve qui alimente la mer Morte, mais aussi l'activité intense des industries cosmétiques... On vient sur les rives de la mer Morte depuis l’Antiquité. Pour ses propriétés bienfaitrices pour la santé — Cléopâtre aurait succombé aux vertus de ses eaux et pratiquait des bains de boue —, mais aussi pour y découvrir les richesses géologiques et historiques du désert de Judée qui l’entoure. Dans un cadre biblique à souhait. La route 1 qui relie Jérusalem à la route 90 — celle qui suit la frontière Jordanienne à l’est, tourne le dos au mont des Oliviers, à son cimetière — le plus ancien du monde encore utilisé — et aux oliviers du jardin de Gethsémani qui, selon l’histoire, a fourni l’ombre à Jésus qui venait s’y reposer avec ses disciples. À peine sortis de la ville « trois fois sainte » la tête remplie de faits, de dates, de monuments et d’émotions, nous nous engageons à bord d’un minibus dans un paysage de collines arides, parsemées de conifères et de maisons blanches, puis, dans le désert de Judée. Quand la Bible prend vie La route 1 qui descend en crescendo depuis Jérusalem mène en une vingtaine de minutes, soit une trentaine de kilomètres, d’une altitude de 800 mètres à quelque 428 mètres sous le niveau de la mer, au point émergé le plus bas au monde : la mer Morte. Après quelques virages en épingle, le bus s’arrête à une halte routière. Un Bédouin sorti de derrière les collines propose de grimper sur son chameau le temps d’une photo. Puis, plantée là, au premier plan des collines pierreuses du désert de Judée, une immense sculpture en terre ocre de l’artiste Or-nah Ran représentant une main formant un zéro. À quelques mètres, un panneau indique que nous sommes ric-à-rac au niveau de la mer. Malgré le soleil qui tape, le corps est traversé d’un frisson à la fois esthétique et sacré. L’imagination s’enflamme. C’est bien dans ce désert argileux d’une superficie de 1500 kilomètres carrés, empreint d’une spiritualité ancienne, que Jésus passa quarante jours et quarante nuits, jeûna et fut tenté par le diable ? Ouf, les cours de religion sont bien loin ! J’y reviendrais pour randonner, dans ce désert biblique de grottes et de canyons. Pour me baigner dans les ruisseaux, marcher le long du canal d’eau douce aménagé par les Bédouins, lire à l’ombre d’un dattier, observer les oryx et visiter, accroché aux parois rocheuses, le monastère Saint-Georges, dans la vallée Wadi Qelt, à la porte de Jéricho. Puis sans crier gare, au sommet du dernier tronçon de la route 1 avant de rejoindre la 90, apparaît la vallée de la mer Morte. Des chaînes de montagnes forment l’arrière-plan de ce grand lac bleu cobalt pétant, ourlé de concrétions de sels. C’est la Jordanie. Assurez-vous de pouvoir recharger vos caméras, la région est photogénique. Un moment rare et magique à savourer. D’un côté, l’ocre du désert de Judée aux allures de planète Mars et de l’autre, le glauque de la mer Morte, aux maintes vertus médicinales. L’endroit géographique par excellence pour traiter le psoriasis et autres affections de la peau, apprend-on au centre de visite Ahava, une entreprise qui utilise les minéraux de la mer Morte pour fabriquer des produits thérapeutiques et de beauté. « Deux semaines de bain de soleil, combinées à des bains de mer et de boue sont un bon traitement pour le psoriasis », affirme Daniela Cohen, cofondatrice du kibboutz Ein Gedi et de son charmant hôtel niché dans un jardin où poussent 900 espèces de plantes. Parmi les massages populaires offerts à Ein Gedi, celui à base de boue chaude et de myrrhe, une plante connue pour ses propriétés antioxydantes, anticancéreuses, antiseptiques, cicatrisantes et anti-inflammatoires. Elle pousse dans le jardin d’Ein Gedi. Pour le psoriasis sans remèdes et sans piqûres, donc, la mer et le soleil comme traitement. Et ici, au point le plus bas du globe, le soleil brille 300 jours par année. Ses rayons ultraviolets indésirables seraient filtrés par une brume d’évaporation si gorgée de minéraux qu’elle offrirait une protection naturelle permettant une exposition plus longue. Mais prudence ! Ce traitement médical naturel suppose le respect d’un certain nombre de conditions et d’une surveillance médicale étroite. Parlez-en à votre médecin. Une visite sur le site Web du « DMZ Medical Center », un centre spécialisé en climatologie, situé à l’hôtel LOT, à Ein Bobek, s’avère une bonne source d’information avant de boucler sa valise : lothotel.com Aïe, les pieds ! Quant à se laisser flotter sans effort dans l’eau tiède et minérale de la mer Morte, en lisant son journal — les clichés ont la vie dure, c’est une expérience unique en son genre. Rien ne survit dans ce vaste lac composé de 27,5 % de sel. Pas un poisson, pas une algue. Rien, à l’exception de… l’Homo touristicus, qui y flotte comme un bouchon. Avant d’y faire trempette, il est conseillé d’enfiler des souliers pour ne pas se couper en marchant sur les cristaux de sels acérés, d’éviter de se raser le jour avant ou de s’y endormir, au risque de se réveiller en Jordanie, entraîné par les vents et les courants. Une montagne d’histoire J’ignorais l’histoire de ce palais construit entre 37 et 31 av. J.-C. par Hérode, en quête d’un refuge aussi confortable qu’imprenable. Et de la révolte des zélotes contre les Romains en 70 apr. J.-C. qui en firent un refuge pour leurs partisans et leurs familles. Deux ans plus tard, les Romains assiègent Massada. Les insurgés brûlent alors magasins et entrepôts et optent pour le suicide collectif plutôt que la prison. La forteresse reste à l’abandon jusqu’au Ve siècle, jusqu’à ce que des moines byzantins trouvent refuge dans des grottes proches du sommet et y érigent une petite chapelle. On y vient aujourd’hui pour errer à travers les vestiges des palais, entrepôts et thermes romains, imaginer la vie luxueuse que menaient à Massada Hérode et sa cour, voir les ruines de la synagogue que les zélotes ont construite à la place des écuries du roi. Et pour la vue extraordinaire sur le désert de Judée, la mer Morte et la Jordanie. Préférablement au petit matin quand le soleil se lève, enflammant les murs du bastion. LES TROIS EIN GEDI L’oasis au parfum biblique, cité à quelques reprises dans la Bible, s’étend sur six kilomètres le long de la route 90, entre le désert de Judée et la mer Morte. Plusieurs embranchements donnent accès à cet éden tropical — irrigué par quatre sources d’eau, au grand bonheur des contemplatifs, des randonneurs et amateurs d’histoire. Réserve naturelle d’Ein Gedi. Le site de 25 kilomètres carrés, qui niche entre les canyons Wadi David et Wadi Arigot, attire les randonneurs. Les sentiers, de longueurs variables, mènent vers des cascades, des sources, des grottes, un temple chalcolithique, une synagogue antique, des points de vue à couper le souffle… Il n’est pas rare d’y rencontrer le bouquetin de Nubie et le daman des rochers venus s’abreuver dans les eaux pures du désert. Le Jardin botanique d’Ein Gedi. Si les miracles existent, ce jardin en plein désert aride de Judée en est un. Situé dans le kibboutz d’Ein Gedi, à 3 km au sud de la réserve naturelle, il rassemble quelque 900 végétaux, dont certains cités dans la Bible, comme la myrrhe, les baobabs géants, les pommiers de Sodome. Hôtel du kibboutz d’Ein Gedi. Jadis une maison d’hôte plantée au cœur du Jardin botanique du kibboutz d’Ein Gedi, fondé en 1953, le bâtiment devient un hôtel de charme avec chambres luxueuses en 2012. Le complexe comprend un établissement thermal de luxe, des piscines, un sauna, un hammam et un restaurant au joli nom de Baobar. On y offre des menus à la carte ou en formule buffet. S’y rendre. Entre les mois de mai et octobre 2018, Air Transat offrira trois liaisons directes par semaine Montréal–Tel-Aviv au coût variant entre 800 $ et 1050 $. Le voyageur a le choix entre des forfaits allant du simple vol aux séjours organisés. ALERTE À L’ENVIRONNEMENT La mer Morte est un haut lieu du tourisme israélien, mais elle serait en voie de disparition. Depuis une cinquantaine d’années, elle aurait perdu un tiers de sa superficie. Les raisons de cet assèchement ? La surexploitation de l’eau du fleuve Jourdain — le fleuve qui l’alimente — pour des besoins d’irrigation, mais aussi l’activité intense des entreprises installées autour, qui fabriquent leurs produits à partir de ses minéraux. En conséquence, on observe la formation de dolines qui transforment peu à peu les rives de la mer Morte en gruyère. En se retirant, les eaux très salées de la mer Morte laissent derrière elles des terrains truffés de poches de sel, et les nappes phréatiques, les pluies et les rivières sont autant d’eaux douces qui lessivent et dissolvent ces poches, laissant des cavités vides en sous-sol qui peuvent s’affaisser radicalement sans prévenir.

  • Un dimanche à Jérusalem

    Un voyage en Israël n’a pas son pareil. C’est unique. Et on en revient touché jusqu’à l’âme. D’avoir parcouru cette terre sainte où les grands noms de la bible sont partout, mais aussi ce pays à la géopolitique complexe qui suscite bien des prises de position. De Tel-Aviv à Haïfa via la mer Morte, Massada, la mer de Galilée, Nazareth, Rosh Hanikra, Akko… Par où commencer? Tiens, pourquoi pas, en ce week-end de Pâques et de Pessa’h, par Jérusalem? Vue sur Jérusalem du Mont des Oliviers La nuit tombe sur Mahane Yehuda, le plus grand marché de Jérusalem. Des visages de grande taille peints dans des couleurs vives sur les rideaux de fer baissés regardent passer les visiteurs. Ceux de rabbins connus et de soldats inconnus, de politiciens et de militants qui ont marqué l’histoire et de Juifs influents dans le monde, comme Steven Spielberg et Sigmund Freud. Des oeuvres dessinées à la bombe et signées Solomon Souza, un artiste d’une vingtaine d’années, petit-fils de Francis Newton Souza (l’un des pères de l’art moderne indien) né à Londres et ayant immigré à Jérusalem alors qu’il était jeune pour étudier dans une école talmudique. « C’est à la demande des commerçants qui souhaitaient une ambiance plus chaleureuse dans le marché que le graffiteur a commencé son projet de raconter en images, sur les rideaux de fer, l’histoire des Juifs et de son peuple », explique Dado Shalom, notre charmant guide. Le meilleur moment pour admirer cette monumentale galerie de personnages d’ici et d’ailleurs, selon Dado, c’est le samedi, jour du shabbat, alors que le marché hiérosolymitain est au repos et que les volets des quelque 350 commerces sont baissés. Mais c’est dimanche et, malgré la pénombre qui s’installe sur la ville sainte, tout est encore ouvert. Entre les étals regorgeant de fruits, légumes, noix, olives, épices, thé, fromage, fruits secs, pain, halva, les peintures des volets en attente d’ouvrir pour la nuit nous observent. Bananes, mangues, artichauts, fraises, oranges, aubergines, pommes, légumes racines… tout ça rappelle qu’Israël est un champion du locavorisme — ce mouvement prônant la consommation de nourriture produite dans un rayon de 100 à 250 kilomètres de chez soi — malgré le désert, donc et le peu d’eau, qui prédomine dans le pays. On parle ici de « miracles agronomiques ». N’est-ce pas un ingénieur israélien en gestion de l’eau, Simcha Blass, qui a découvert l’irrigation par le goutte-à-goutte ? Constatant que l’eau apportée de manière lente et régulière par une succession de gouttes produisait des résultats de croissance remarquables, il a mis au point le tube à base de goutteurs, une forme d’arrosage qui permet des cultures d’arbres fruitiers, de légumes ou de fleurs même en milieu infertile. Le fameux procédé est produit de manière industrielle dès 1965 par la société Netafim, installée au kibboutz Hatzérim, dans le Néguev. Mahane Yehuda Et Dieu qu’on mange bien dans ce petit pays du Proche-Orient bordé à l’ouest par la Méditerranée, au sud par le golfe d’Eilat, et qui partage ses frontières avec le Liban au nord, la Syrie au nord-est, la Jordanie et la Cisjordanie à l’est, l’Égypte et la bande de Gaza au sud-ouest. Mahane Yehuda est un passionnant périple culinaire. Entre les piles de pain pita, les stands de harengs saurs, de houmous, de confiseries surgissent des bars à expresso et à smoothies, des stands à falafels et de jolis pubs où l’on déguste des vins du pays — car le raisin s’épanouit très bien sous les divers microclimats d’Israël — et des bières locales comme la Goldstar. Mais également des bières artisanales aussi originales que celle créée à base de pois chiches, de dattes et de sarrasin dans les collines de Galilée, là même où Jésus est censé avoir transformé l’eau en vin. À Jérusalem, c’est la bière qui coule à flots lors du festival annuel au mois d’août. Un adage dit qu’« à Tel-Aviv on joue, à Jérusalem, on prie ». Façon simple de résumer les choses. Quoi qu’il en soit, si j’ai adoré Tel-Aviv pour son dynamisme, son côté cool et moderne, sa joie de vivre à la californienne, ses restos, ses discothèques, ses bars et ses cafés branchés, son surf et ses pistes cyclables, son patrimoine architectural… j’ai été envoûtée par Jérusalem. Entre autres parce que tout ce qui était théorique et virtuel dans mes anciens cours de catéchèse et le dimanche à l’église devient ici une réalité palpable et concrète. Que l’on soit croyant ou non. Dernière résidence du Christ, troisième ville sainte pour l’islam après La Mecque et Médine, lieu de retour du messie pour les Juifs, Jérusalem est le carrefour des trois religions monothéistes. Sa vieille ville est distribuée en quartiers : arménien, chrétien, juif et musulman. Complexe, Jérusalem ? Oh que oui. De quoi se noyer dans l’épaisseur des faits, des dates, du bâti et des émotions. Ici, des murs romains, omeyyades, croisés, mamelouks, ottomans… Là, des synagogues séfarades, la tour de David, la mosquée Al-Aqsa. Mais où est donc le Saint-Sépulcre ? Sites de la chrétienté Pour les chrétiens, l’église du Saint-Sépulcre est édifiée sur le site du Calvaire (ou Golgotha), exactement à l’endroit où Jésus « a été cloué sur la croix, est mort et est ressuscité ». Pour le rejoindre, nous montons et descendons quelques dénivelés — Jérusalem est à plus de 800 mètres d’altitude et tout en collines —, traversons des passages couverts, des ruelles aux pavés vieux comme le monde, puis de jolies petites places aux odeurs de kebabs chawarma. Nous voilà sur la Via Dolorosa, le fameux chemin de croix pédestre et ses 14 stations, dont 5 se trouvent à l’intérieur de l’église du Saint-Sépulcre. Jésus aurait emprunté cette route alors qu’il portait sa croix jusqu’au calvaire. Il faut compter une heure à pied pour la parcourir à partir de la première station, où Ponce Pilate aurait condamné à mort Jésus, jusqu’à la 10e qui se trouve avec les quatre autres à l’intérieur de Saint-Sépulcre. Les différentes stations sont marquées de plaques rondes sur les murs et les portes. Ici, l’endroit où Jésus fut chargé de sa croix, là où il serait tombé la première fois, plus loin, la rencontre avec sa mère et celle avec Simon de Cyrène, ici, la deuxième chute, là, la troisième… L’église du Saint-Sépulcre se trouve au milieu des souks, en bordure des quartiers chrétiens et musulmans, sur une petite place étroite coincée entre les maisons de la vieille ville, au pied d’un minaret. Étrange ! Son apparence n’a rien d’exceptionnel, mais l’immense ferveur des pèlerins a contribué à la sacraliser. Inutile d’espérer un moment serein dans ce lieu bondé. « La basilique est partagée entre plusieurs Églises chrétiennes (catholique, arménienne, syrienne, copte, éthiopienne…), explique la guide Paule Rakower. Celle des Grecs orthodoxes occupe la plus grande partie de l’édifice. Ils assurent l’entretien du tombeau. » Sur le pas de la porte, des fidèles touchent et embrassent la pierre de l’onction. C’est sur cette dalle rose qu’on aurait déposé le corps de Jésus pour le préparer avant qu’il soit enseveli. À l’entrée de la chapelle du Calvaire, à l’étage, se trouve la 10e station du chemin de croix. Jésus aurait été dépouillé de ses vêtements ici. Puis, tout à côté, la 11e où il a été cloué sur la croix. La 12e station se trouve dans la chapelle grecque orthodoxe. Elle témoigne de la crucifixion de Jésus. Le rocher du calvaire, sur lequel un autel a été érigé, niche en son centre. Petit hic, toutefois : le recueillement est difficile devant le rocher où fut déposé le Christ après la crucifixion. Pressés par la foule qui attend son tour, les pèlerins ne passent que quelques secondes dans l’étroit caveau. Un pope à l’air bourru se charge d’écouler le flot des visiteurs. À gauche de cet autel, la 13e station, où le corps de Jésus aurait été descendu de la croix et remis à Marie. Quant à la 14e, le Saint-Sépulcre, attendez-vous à y faire la queue sous des voûtes de tous les styles, dans la fumée de l’encens et à la lueur des lampes à huile. Cap maintenant vers le mur des Lamentations, le site le plus sacré du judaïsme. Les Juifs y pleurent toujours la perte de leur second Temple. Les hommes prient d’un côté, les femmes de l’autre. On dirait une grande synagogue à ciel ouvert. Les Juifs croient que les prières et les requêtes insérées entre les pierres de ce mur érigé il y a 2000 ans ont de fortes chances d’être exaucées. La chair de poule Tandis que les bars et les bouis-bouis du marché Mahane Yehuda lèvent leurs rideaux métalliques pour la soirée, que les restaurants se remplissent, que les murs de la vieille ville s’illuminent, que les musiciens s’installent dans les bars et autour des remparts, un spectacle son et lumière éblouissant anime les murs de la citadelle de David, tout près de la porte de Jaffa. Cet événement nocturne qui utilise la technologie du trompe-l’oeil en 3D, relate l’histoire de Jérusalem, de la période cananéenne à l’État d’Israël, en passant par les périodes israélite, babylonienne, perse, hellénistique, romaine, byzantine, musulmane, croisée, mamelouke, ottomane et britannique. Finalement, le vieil adage disant que Tel-Aviv fait la fête pendant que Jérusalem prie ne tient peut-être plus tout à fait la route. Jérusalem, bien que sainte, oui, est aussi très festive, plutôt cool, gastronomique et créatrice. Certainement unique et touchante jusqu’à l’âme. Le soleil se lève sur le mont des Oliviers. Nous sommes sans mot devant les milliers de tombes du plus ancien cimetière du monde encore utilisé. En bas, dans le jardin de Gethsémani, des oliviers auraient fourni l’ombre à Jésus et ses disciples qui allaient s’y reposer. C’est dans ce jardin qu’il aurait été arrêté. EN VRAC Dormir. À l’hôtel Inbal (cinq étoiles) pour son confort, mais aussi pour sa situation géographique exceptionnelle au-dessus du parc Hapaamon et de la vieille ville, puis à une courte distance de marche des principaux sites d’intérêt culturel. Le buffet du petit-déjeuner est excellent, comme presque partout en Israël. Manger. La cuisine israélienne est divine, composée d’une grande variété de légumes, viandes et poissons grillés, pois chiches et sarrasin. Le végétarisme et le véganisme y sont très à la mode. Le choix de restaurants est grand à Jérusalem, tant dans la vieille ville que dans la partie moderne. Le restaurant Zuni, ouvert tous les jours 24 heures sur 24, est une bonne adresse de type brasserie. Le risotto et les calmars y sont excellents. Le marché Mahane Yehuda pour un bon café, pour une dégustation de bière ; pour goûter (et acheter en cadeau) le halva d’Elie Mammam. Impossible de ne pas craquer pour l’exquise pâte de sésame farcie de pistaches et d’amandes de ce Marocain d’origine. Il propose près d’une centaine de parfums. Vie de bar. Au Nocturno, la nuit de la semaine il y a des concerts, des lectures de poésie, du stand-up, des conférences, des projections de films, de la danse swing… À la fois bar et café, Nocturno propose un menu lacté, végétarien et végétalien. Suggestions de lecture. Un voyage en Israël se prépare. Il faut lire sur son histoire, ses religions, ses enjeux politiques… au-delà d’articles qui n’en couvrent qu’un petit aspect. Lire puis voir pour mieux comprendre ce pays fascinant à la géopolitique complexe. Comprendre Israël de l’auteur montréalais Elias Levy, aux éditions Ulysse. Israël et les territoires palestinien, aux éditions Lonely Planet, un excellent guide touristique qui propose de nombreuses adresses, les sites à visiter, la sécurité à observer, des idées d’activités avec les enfants, des cartes claires… Indispensable ! La mémoire d’Abraham, de l’auteur Marek Halter. Ce roman raconte 2000 ans d’histoire d’une famille juive, scribe de père en fils. Excellent ! Ma terre promise, Israël, triomphe et tragédie, du journaliste et chroniqueur Ari Shavit. Ce livre examine les complexités et les contradictions de la condition israélienne et s’appuie sur les événements du passé pour jeter un éclairage neuf sur le présent. Article publié dans le journal Le Devoir du 15 avril 2017

  • Île de Vancouver - entre surf et afternoon tea

    D'un côté, d'immenses forêts, des arbres géants, des pics enneigés, des anses et des écueils à faire damner les marins, des vagues à faire suer les surfeurs. De l'autre, le chic empesé d'une coquette ville aux couleurs et traditions britanniques, des jardins magnifiques, des parcs, des pubs et l'afternoon tea que même un tremblement de terre ne saurait ébranler. Où qu'on soit sur l'île de Vancouver, on vit la nature, on vit la vie à pleine puissance. Île de Vancouver — «Nous survolons actuellement le détroit de Georgia et la ville devant vous, c'est Nanaïmo, deuxième en importance après Victoria et ville-étape du traversier qui amène quotidiennement, depuis Vancouver, des milliers de vacanciers. Ensuite, nous traverserons la chaîne de montagnes qui sépare le nord et le sud de l'île de Vancouver avant d'atteindre la côte ouest du Pacifique», explique le pilote, qui connaît sa ligne caillou par caillou. Je suis dans un petit avion de KD Airlines qui fait la liaison Vancouver-Tofino, sur la côte ouest de l'île. De prime abord, on n'imagine pas l'île de Vancouver aussi montagneuse: «Le plus haut sommet est le Golden Hinde (2220 mètres), dans le parc Strathcona, au centre de l'île ; le second est le mont Elkhorn (2194 mètres) et le troisième, le mont Colonel Foster (2133 mètres). Et la montagne, là-bas, au-dessus de Port Alberni, c'est le mont Arrowsmith (2000 mètres).» Que sait-on, au juste, de l'île de Vancouver ? Que Victoria est la capitale de la Colombie-Britannique ; que les riches habitants de Vancouver passent leur week-end à Victoria pour échapper à la pluie ; que les Chinois ont joué un grand rôle dans le développement de Victoria en participant à la construction du chemin de fer ; que le Chinatown de Victoria est le plus vieux quartier chinois au Canada ; qu'on retrouve à Victoria le plus haut totem du monde... Soit, mais l'île se limite-t-elle à sa capitale provinciale ? Un oeil sur les pics enneigés, un autre sur une cascade qui chute du haut d'une falaise d'une soixantaine de mètres et un autre encore sur le pilote déterminé à s'approcher le plus près possible du rocher pour que nous ne perdions rien du spectacle, j'écoute attentivement l'étrange leçon de géographie qui dépasse la simple énumération de lieux et de chiffres. Saviez-vous que le Dinghy Dock Pub, un pub flottant amarré au quai de l'Île Protection, à Nanaïmo, sert les meilleurs fish and chips de l'île ; que le Harbour Quay de Port Alberni est un endroit sympathique pour prendre un café et s'informer de l'horaire des bateaux vers la réserve du parc national Pacific Rim ; que les sapins de Douglas du MacMillan Provincial Park-Cathedral Grove atteignent parfois 80 mètres ; que le mont Washington, situé dans la vallée de Comox, à 31 kilomètres à l'ouest de Courtenay, est la deuxième destination de ski après Whistler ? Mais où est donc Tofino ? Seuls les surfers et les écolos semblent connaître Tofino. Les premiers pour sa superbe plage de 15 kilomètres, Long Beach, où les vagues peuvent atteindre jusqu'à huit mètres en hiver ; les seconds pour avoir entendu parler, dans les années 1980, du premier barrage routier au Canada établi par les Amérindiens et le reste de la population pour protester contre le projet de coupe commerciale de billes de bois dans la vieille forêt pluviale de l'île de Meares. En 2000, un territoire de quelque 350 000 hectares est enfin déclaré réserve de la biosphère de l'UNESCO. Le temps, à Tofino, semble s'être arrêté au début des années 1970. Il n'est donc pas rare de croiser dans la région des hippies à bord de leur Westfalia transportant trois ou quatre planches de surf sur le toit. En voiture, de Montréal, on met cinq jours et sept heures pour atteindre ce Malibu canadien: cinq jours jusqu'à Vancouver, deux heures de ferry jusqu'à Victoria et cinq heures de route de la capitale provinciale au royaume de la vague. À Tofino, tant pis s'il pleut ! Il en faut un peu plus pour annuler une «rando» en forêt pluvieuse, une leçon de surf ou une sortie en kayak de mer. D'ailleurs, c'est sous la pluie qu'on observe les plus beaux spécimens de limaces «bananes», les plus grosses du monde, qui peuvent mesurer jusqu'à 25 centimètres de long et trois centimètres de diamètre. Un mollusque géant d'un beau jaune... citron. Où que vous soyez dans les environs de Tofino, si vous n'êtes pas debout dans l'eau salée, vous êtes dans la forêt pluviale. La réserve du parc national Pacific Rim, entre Ucluelet et Tofino, propose à ceux qui n'ont nullement l'intention de s'enfoncer sur la West Coast Trail neuf sentiers balisés de moins de cinq kilomètres, tous accessibles par la navette Tofino Beach Bus. Vive le mauvais temps ! Au Wickaninnish Inn, une élégante bâtisse en bois de cèdre dressée sur un promontoire face au Pacifique, les propriétaires ont fait de la pluie et du mauvais temps leur marque de commerce. Et ça marche ! Particulièrement entre novembre et février, alors que les clients de l'hôtel peuvent observer de leur chambre une tempête tous les trois ou quatre jours. Cet établissement Relais & Châteaux en bordure de la forêt pluviale est pure merveille. La décoration des chambres et suites a été réalisée avec grand soin. Du support à papier de toilette au savonnier en passant par les tuiles, les lampes, les meubles, chaque matériau provient de la nature. La pierre, le bois et les tissus aux couleurs de terre dominent avec la cheminée, la baignoire profonde et les baies vitrées. L'engagement est total avec l'extérieur. On trouve donc à Wickaninnish Inn une clientèle entichée de nature venue bénéficier tant des activités de plein air que des plaisirs de la table. Le restaurant The Pointe, installé dans une salle octogonale entourée de baies vitrées et qui laisse voir les jours de tempête un panorama grandiose, fait dans la gastronomie. On y propose une cuisine typiquement Pacific Northwest d'influence locale, composée de produits fermiers et biologiques. Un thé à Victoria Au centre de Victoria, face au port, se trouve l'Empress Hotel, un établissement style château construit pour le Canadien Pacifique au début du XXe siècle par l'architecte Francis Rattenbury. Aucun des salons de thé de la ville ne rivalise avec l'atmosphère distinguée de son afternoon tea. Concombre, saumon fumé et curry de poulet et de mangue garnissent les petits sandwichs. Confiture de fraises et crème Devon accompagnent les scones. Théière ancienne, vaisselle victorienne, service royal... tout est fait pour que l'expérience reste ancrée dans la mémoire. Le coût de cette collation beau chic beau genre: 45 $CAN. Les Amérindiens occupaient l'Île de Vancouver depuis 8000 ans lorsque les premiers Européens y débarquèrent au XVIIIe siècle. D'abord signalée par les explorateurs espagnols en 1774, puis visitée par James Cook en 1778, l'île fut baptisée en l'honneur du capitaine (et cartographe) George Vancouver qui en fit le tour en 1792. Cinq décennies plus tard, la Compagnie de la Baie d'Hudson établit un comptoir de traite de fourrures à Fort Victoria, la pointe sud de l'île, aujourd'hui le site de la capitale de la Colombie-Britannique. À 20 kilomètres au nord de Victoria, sur la péninsule de Saanich, se trouvent The Butchart Gardens. Nés en 1904 de la désaffection d'une carrière à chaux, ces jardins centenaires superbement fleuris ravissent l'oeil en particulier l'été, lorsque la floraison atteint son apogée. Jardin de roses, jardin italien, jardin japonais, mare à nénuphars, rhododendrons et bégonias couvrent les 22 hectares de ce terrain superbement aménagé de fontaines, de sculptures et de bancs qui invitent à la flânerie. On peut aussi se promener sur la Saanich Peninsula, une presqu'île qui se trouve également au nord de Victoria. On y découvre une série de petites zones résidentielles à l'architecture victorienne ainsi que de beaux bâtiments de style Tudor. À Mount Douglas Park, l'ascension de la colline jusqu'au sommet offre une vue panoramique sur les Gulf Islands, le détroit de Georgie, le détroit Juan de Fuca et les sommets enneigés de la chaîne de montagnes Olympic Range, dans l'État de Washington. Et peut-être la chance d'apercevoir un orque ! Mille et une choses encore... Les Provincial Legislature Buildings, où siège le gouvernement de la Colombie-Britannique et qui voisinent l'Empress Hôtel ; le Bastion Square avec son marché artisanal en plein air ; une promenade à Chinatown pour découvrir l'arche Tong Ji Men qui représente l'esprit de coopération entre les cultures chinoise et canadienne ; les habitations flottantes à Fisherman's Wharf ; et le restaurant Barb's Place qui comblera votre envie de manger au coucher du soleil des fish and chips bien gras servis dans du papier journal. Beautiful British Colombia ? C'est d'accord ! ******** Cet article a été écrit il y a avant la pandémie. Bien que les sites touristiques demeurent les mêmes, les restos et les hôtels aussi, mieux vaut vérifier les informations de réouverture en ces temps de COVID. À consulter - Les guides Ulysse Vancouver, Victoria et Whistler ou le guide Ulysse Ouest canadien. - Renseignements: Tourism Vancouver Island, Nanaïmo, (250) 754-3500, www.islands.bc.ca.

  • Nantes et son musée Jules-Vernes

    Premier musée et première ville sur ma liste des choses à voir, une fois le droit de voyager pour le plaisir revenu.... Avec sa Ligne verte, un parcours pédestre ou à vélo de quelque dix-sept kilomètres, qui mène d’une œuvre d'art à un élément remarquable du patrimoine, d’une ruelle historique à une architecture contemporaine, d’un point de vue étonnant sur la ville à un incroyable coucher de soleil sur l’estuaire, d'un musée à l'autre - dont le musée Jules Vernes, Nantes m'apparait une ville d'art et de culture exceptionnelle...À très bientôt! J'adore Jules Vernes. J'ai dévoré d'une traite - comme lui a sûrement dû dévorer, et très jeune, Victor Hugo, Alexandre Dumas, Alfred de Vigny, Alfred de Musset, Molière, Sahakespeare..., «L'Île mystérieuse», «Vingt mille lieues sous les mers» et «Michel Strogoff». J 'ignorais - merci Xavier Theret, directeur de la promotion internationale - Le voyage Nantes - , pour votre magnifique présentation de la ville aux médias québécois - , que Jules Vernes était né à Nantes, jolie ville d'art et de culture qui s'étend sur les rives de la Loire, à une cinquantaine de kilomètres de l'Atlantique. C'était un 8 février 1828, sur l'île Feydeau. Musée Jules-Vernes Un musée entièrement consacré à l'auteur. Cool! Il est situé au sommet de la butte Sainte-Anne et domine la Loire et le port. On m'a expliqué que ce musée exposait des livres, des manuscrits, des documents, des extraits d'œuvres, des illustrations, des affiches, des portraits de l'écrivain, des jeux et objets lui ayant appartenu et légué par ses descendants. Mes trois livres favoris Vingt Mille Lieues sous les mers paru en 1869-1870 relate le voyage de trois naufragés capturés par le capitaine Nemo, mystérieux inventeur qui parcourt les fonds des mers à bord du Nautilus, un sous-marin très en avance sur les technologies de l'époque. L’Île mystérieuse, paru en 1875, relate les aventures de cinq personnages qui, fuyant le siège de Richmond en Virginie pendant la guerre de Sécession, s'échouent sur une île inconnue qu'ils baptisent l'île Lincoln. Grâce à leurs compétences variées et leur astuce, ils s'efforcent de reconstituer une vie confortable sur cette île déserte, mais ils font face à plusieurs périls et à d'étranges phénomènes. Michel Strogoff paru en 1876, relate le périple de Michel Strogoff, courrier du tsar de Russie Alexandre II, de Moscou à Irkoutz, capitale de la Sibérie orientale. Sa mission est d'avertir le frère du tsar, resté sans nouvelles de Moscou, de l'arrivée des hordes tartares menées par le traître Ivan Ogareff pour envahir la Sibérie. Sur cette route il croise Nadia, ainsi que les journalistes européens Harry Blount et Alcide Jolivet. Alors que les voyageurs mettent en moyenne cinq semaines pour aller de Moscou à Irkoutsk, les courriers du tsar n'ont besoin que de dix-huit jours. À cause de toutes les épreuves à surmonter, Michel Strogoff a mis trois mois pour y parvenir. Prochain livre sur ma liste: «Les enfants du capitaine Grant».

  • Elko, Nevada - Festival de poésie cowboy

    Eh bien oui, il y a une poésie cow-boy. Jolie, d’ailleurs. Qui parle de la nature, du cheval, des vaches, des montagnes, du soleil, du blizzard, de l’entraide, de la famille, de Dieu… Des mots ordinaires, sur une vie ordinaire racontée de façon extraordinaire. Qui prend aux tripes. C’est lors d’un voyage à Elko, il y a quelques années, que j’ai découvert le « vrai » cow-boy. Celui qui, le jour, rassemble le bétail pour le mener au pâturage dans les montagnes, et qui, le soir, gratte la guitare autour d’un feu en fredonnant une chanson. Pour garder les bêtes tranquilles. Le cow-boy qui trime dur dans le ranch en essayant tant bien que mal de survivre à une industrie grippée. Celui qui arpente à cheval la piste sur des milliers de kilomètres. Celui qui est vêtu d’un jeans à la taille, d’une ceinture stylée et d’un chapeau à large bord. Et qui devient poète. Oui, Elko appartient à l’Ouest, l’authentique. L’élevage fait partie des richesses de la région et on y fabrique des selles reconnues dans le monde entier. Les cow-boys que l’on croise dans la rue ne sortent pas d’un film. Et ils ont troqué leur fusil contre un téléphone portable. Mes deux filles m’accompagnaient. Le film Fievel au Far West n’était pas bien loin dans leurs souvenirs. Et pour s’imprégner de l’âme cow-boy, nous avons opté pour un road trip au départ de la « cité des péchés ». Question de découvrir dans le détail les étendues désertiques et montagneuses du Nevada qui inspirent tant ces buckaroos. Depuis Las Vegas, il faut plus de huit heures pour rejoindre la ville d’Elko, située au pied des Ruby Mountains, entre Reno et Salt Lake City. Mais le voyage en voiture sur les grandes routes solitaires du Great Basin, au coeur d’un désert rustique parsemé d’armoises, d’arbres rabougris, de cactus, de genévriers, et dominé par des montagnes aux sommets enneigés, vaut le coup. Nous avons dormi à Pioche (282 km de Las Vegas), à l’hôtel historique Overland Hotel & Saloon. À Ely (460 km de Las Vegas), à l’historique Hotel Nevada and Gambling Hall. À Elko (760 km de Las Vegas), au Red Lion Inn pour une expérience plus chic. Spectacles et activités reliés au National Cowboy Poetry Gathering y prennent place. À Caliente (240 km de Las Vegas), au Shady Motel. Ici, la nuit, lorsque passe le train reliant Los Angeles à Salt Lake City toutes les deux heures, on comprend mieux la vie à proximité d’une voie ferrée. Nous avons raffolé des brioches à la cannelle du Windmill Ridge, un café-resto-hébergement sympa sur la route 93, à Alamo (155 km de Las Vegas). Le copieux souper du restaurant basque The Star (sorte de «all you can eat» basque), au 246 Silver Street, à Elko. Les Basques sont nombreux à vivre au nord du Nevada et à faire l’élevage de moutons. Le resto Jailhouse, à Elko. Ce n’est pas tous les jours qu’on mange (et bien) dans une cellule d’une ancienne prison du Far West. Siroter un whisky au bar du Western Folklife Center, à Elko. Parcourir la ville d’Ely à pied. Une vingtaine de murales peintes sur les murs des édifices de la rue principale racontent l’histoire du comté de White Pine, de l’époque amérindienne à celle où Ely vivait de son élevage de bétail et de son industrie minière, elynevada.net. Une virée dans les Ruby Mountains, particulièrement le Lamoille Canyon. Malheureusement cette année, dû à la pandémie de COVID19, la 37ième édition du National Cowboy Poetry Gathering n'aura pas lieu «live» à Elko. Il y aura par contre pour les membres des événements présentés en ligne, jusqu'au 30 janvier 2021. Pour en savoir plus: https://www.nationalcowboypoetrygathering.org/

  • Îles Cayman - Festival gastronomique

    Chaque année, en janvier, à Grand Cayman, se tient un méga festival gastronomique où se rencontre une jolie panoplie de chefs venus/es d'un peu tous les coins du monde. Cette année, à cause de la pandémie, l'activité qui aura lieu comme d'habitude au Ritz Carlton Grand Cayman, se fera entre chefs et amateurs de bonne cuisine locaux. Question de garder la main en attendant des jours meilleurs. Voici toutefois quelques souvenirs de la journée du 19 janvier 2020 , il y a un an donc jour pour jour. Et à l'an prochain pour la 14 ème édition. Chef Bernard Guillard, du resto The Marine Room à la Jolla à San Diego et chef Philippe Haddad...

  • Tunisie - Les oliviers dans le paysage

    Entre mer, désert, montagnes et vertes collines, des oliveraies à perte de vue. On parle d'autour de 1,8 million d’hectares répartis sur tout le territoire. Environ quelque 82 millions d’oliviers. La Tunisie peaufine ses huiles d’olive depuis la création de Carthage. C'est en assistant, en avril 2018, à la remise des prix du 4e concours national de la meilleure huile d’olive conditionnée, les Tunisian Olive Oil Awards, que j'ai eu le plaisir de découvrir le monde des huiles d'olive tunisiennes, des huiles d’exception, fabriquées de façon artisanale, dans les règles de l’art, et dont on ne parle encore que peu dans le monde. Car l’on associe avant tout la fabrication des huiles d’olive de qualité à l’Italie, à la Grèce et à l’Espagne. La Tunisie occupe toutefois une place bien loin d’être négligeable. Sans compter que ce pays de la côte méditerranéenne est l’un des plus grands producteurs au monde. Plusieurs marques d’huile d’olive extra-vierge tunisienne ont été primées lors de prestigieux concours internationaux, comme ceux de Tokyo, de New York, de Los Angeles… La Tunisie travaille fort pour faire de son huile d’olive un condiment de qualité, commercialisé en bouteille, avec une origine et des saveurs originales. Et bio. Les olives sont dans l’ADN des Tunisiens depuis la fondation de Carthage par les Phéniciens. Une légende raconte que ce serait la reine Didon — ou Élyssa, soeur du roi Pygmalion (Tyr) — qui fonda la cité. Une huile d’olive tunisienne, la Terra Delyssa, s’est d’ailleurs inspirée de cette légende pour son marketing. En passant, on retrouve assez facilement cette huile extra-vierge bio dans les épiceries de Montréal. On la reconnaît à son étiquette jaune représentant un cheval avec une branche d’olivier en guise de crinière. L'or vert de Segermes À Segermes, situé au nord-est de la Tunisie, à une soixantaine de kilomètres de Tunis tout est fait manuellement, la cueillette, la trituration, le conditionnement et le stockage », précise Mounir Boussetta, producteur et propriétaire de ce magnifique domaine. « Et toutes les cultures sont certifiées biologiques par Ecocert, depuis 2011 », dit-il fièrement. « Segermès tient son nom de l’antique ville romaine sur laquelle nous avons construit cette jolie structure en 2015 », explique l’oléiculteur en désignant les vestiges d’une église byzantine. « Les oliviers poussent depuis 1500 ans. Les Romains, les Byzantins et autres civilisations ont récolté, broyé et pressé les olives bien avant nous. » Mounir Boussetta cultive deux variétés d’olives, la chemlali et la chetoui, et l’huile sauvage, résultat du jus du fruit de l’oléastre — un arbre originaire d’Afrique du Nord qui pousse à l’état naturel grâce aux pépins digérés et disséminés çà et là par les oiseaux. Une visite de l’élégant domaine nous enseigne que, pour donner une huile d’olive de bonne qualité (vierge ou extra-vierge), les olives doivent être pressées dans les heures qui suivent la récolte, et le malaxage se fait à froid, entre 25 et 28 °C, et rapidement. « Mon but est de produire un fruité vert, issu de la récolte d’olives en tout début de saison. Ce choix diminue ma quantité d’huile d’olive, mais me garantit en contrepartie une huile d’exception. Je cherche à produire de la qualité, non de la quantité. » Mounir Boussetta a produit, cette année, 50 tonnes d’huile d’olive certifiée bio, qu’il souhaite vendre aux États-Unis en petites bouteilles de 250 ml. Des huiles avec une note parfois fruitée verte ou subtile, parfois amère contribuant à l’équilibre, ou piquante… Les pentes de Ben Ammar Bio El Fahs. Charmant, ce coin de pays situé à une soixante de kilomètres au sud-ouest de Tunis. Des collines vertes, des moutons qui broutent, des cigognes qui nichent sur quasi tous les poteaux le long de la route, des vendeurs d’escargots, des oliveraies… Au domaine Ben Ammar, une ferme biologique familiale de 200 hectares située dans la région montagneuse de Jebel Mansour, où l’on produit « Ivlia », une huile d’olive biologique faite d’olives chetoui, nous sommes accueillis par Rawia Ben Ammar, la directrice des ventes, son beau-frère, Chaouki Ben Ammar, et leur assistant, Ali Elborni. Nous avions déjà eu le plaisir de leur serrer la main le soir d’avant alors que le domaine Ben Ammar recevait le premier prix de la 4e édition du concours national de la meilleure huile d’olive conditionnée pour la catégorie de l’huile d’olive au « fruité moyen ». Comme au domaine de Segermès, une huile d’olive d’exception dont les olives auront été cueillies à la main, pour éviter les chocs à cette étape de la fabrication, et pressées à froid dans les heures qui suivent la récolte via des installations — moulin, fûts de stockage en acier inoxydable et laboratoires à la fine pointe de la technologie. « Et tous les déchets sont recyclés », précise Rawia Ben Ammar. « Les peaux d’olive sont transformées en pâtes, les noyaux sont brûlés. Ces déchets bio, bien sûr, seront mélangés à du fumier et transformés en compost pour enrichir la terre. » Le domaine Ben Ammar, certifié bio depuis sept ans, ne baigne pas que dans l’huile d’olive et les olives de table. La famille élève quelque 3000 poules tout-terrain, qui courent en liberté dans un grand champ et ne se nourrissent que de légumes et de graines bio qui poussent sur les terres du domaine. Elle cultive aussi tomates, artichauts et amandes et embouteille une excellente eau de source provenant de la montagne à côté. Nous suivons un camion chargé d’artichauts et de fenouil, puis un autre de branches et de feuilles d’olivier destinées à la confection du savon. Rien ne se perd ! LE TOURISME OLÉICOLE Entre la mi-mai et la mi-juin, l’olivier est en fleurs. À la fin août, les olives ont atteint leur taille définitive. Elles sont de couleur vert cru. Dès qu’arrive l’automne, elles virent au vert tendre, puis au vert pâle. Si on les laisse profiter du soleil, elles se teintent de rose et de mauve pour passer au violet, au brun foncé et au noir. La cueillette se fait en moyenne entre les mois d’octobre et février. Un bon moment pour venir au pays et visiter quelques moulins à huile en activité. Les oliviers poussent sur tout le territoire tunisien.

  • Tunisie - Un thé au Café des Nattes

    Beaucoup connaissent le Café des Nattes, à Sidi Bou Saïd. On y a tous dégusté un thé à la menthe surmonté d'une bonne quantité de noix de pins. Ou un café turc parfumé à la fleur d'oranger. En d'autres temps ce charmant café tout en hauteur, a vu défiler les peintres Paul Klee, August Macke, Louis Moilliet. Les écrivains André Gide, et Simone de Beauvoir aussi. Il y a deux terrasses à l'extérieur qui permettent de voir le va-et-vient des bateaux sur la mer tout en bas et la vie sur la rue principale qui mène à ce café adoré des touristes. L'intérieur, charmant comme tout, vaut la visite. En ce qui me concerne, c'est entre les colonnes du genre sucre d'orge ou canne en bonbon, bien assise sur une banquette recouverte de nattes rouge et vertes, que j'aime y déguster le fameux thé à la menthe et aux noix de pins. On ne voyage pas en ce moment, mais rien n'empêche de se faire un thé la menthe et d'y ajouter ces fameuses noix de pins en les grillant légèrement avant de les ajouter dans le verre. Et de lire, tient pourquoi pas, le roman Les Faux-monnayeurs d'André Gide... Placé sous la protection d'un saint depuis le 13 è siècle ce petit village tout en bleu et blanc est un plaisir pour les yeux. On y passe facilement la journée à flâner dans les petites rues.

  • Tunisie - le fruit qui fait date à Tozeur

    Si la jolie capitale du Jérid se visite à l’année, il y a un plus à y aller en automne : la récolte des dattes. Voilà l’occasion de saisir l’énorme travail que nécessite la culture de ce fruit avant d’arriver dans nos magasins d’alimentation. Eh oui, la fameuse Deglet Nour provient entre autres de Tozeur, une ville à l’orée du Sahara bien connue des voyagistes.​ On dit « entre autres » car le réputé cultivar, natif de la région de Biskra, en Algérie, n’est pas cultivé que dans le nord-est algérien et le sud-ouest tunisien, mais aussi dans tout le bassin méditerranéen ainsi qu’en Californie, là où le climat s’apparente à celui de l’Afrique du Nord. « Je t’explique pour la Deglet Nour algérienne et tunisienne, lance Mohamed Larbi, importateur de dattes au Canada. Avant qu’il y ait frontière, le nomade du Sahara, le Berbère, ne faisait pas la différence entre les dattes algériennes et la tunisienne. Elles avaient le même goût. « Si on regarde la carte géographique, on voit que la région des chotts — grands lacs salés bordés d’oasis — est à califourchon sur les deux pays. Même richesse de la terre, mêmes conditions climatiques. La Deglet Nour, tunisienne ou algérienne, c’est la même datte. » Une origine incertaine Si l’origine du dattier reste incertaine, la plante s’épanouit à merveille dans les oasis sud-tunisiennes. Elle y aurait élu domicile au temps des Phéniciens qui pratiquaient la phoeniciculture, ou culture du dattier. Ils auraient transmis leur science à l’ensemble du bassin méditerranéen. Phoenix dactylifera est l’appellation scientifique du dattier. Le terme « phoenix » proviendrait de « phoinix », nom du dattier chez les Grecs de l’Antiquité, qui le considéraient comme l’arbre des Phéniciens. Ce qui explique le terme « phoeniciculture ». Quant au mot « datte », il est vraisemblablement apparu dans la langue française au XIIIe siècle. Issu du latin dactylus, qui l’a emprunté au grec dactylos (doigt) par allusion à la forme du fruit. En arabe, le nom Deglet Nour signifie « datte de lumière » ou « datte lumineuse ». D’ailleurs, pour en vérifier la maturité, il suffit de l’exposer à la lumière. Si l’on aperçoit le noyau au travers de sa chair ambrée, c’est qu’elle est prête pour la consommation. La ville de Tozeur est de tous les circuits touristiques offerts par les voyagistes qui proposent la Tunisie. Sauf qu’elle est surtout considérée comme une étape avant le désert. Située à 450 kilomètres au sud-ouest de Tunis, on y fait halte pour la nuit et une courte visite de sa palmeraie. La cité vit d’ailleurs au rythme de celle-ci, sa plus grande richesse économique. Cette opulence, Tozeur la doit à l’homme de lettres et de sciences Ibn Chabbat, né ici en 1221. La principale contribution de ce savant qui fut poète, écrivain, imam et cadi : un plan ingénieux destiné au partage des eaux et à l’optimisation de l’irrigation dans les oasis du Jérid. L’oasis de Tozeur couvre plus de 1000 hectares et compte près de 400 000 palmiers-dattiers. On y cultive la Deglet Nour, destinée principalement à l’exportation, mais aussi l’Alig, la Khouat Alig et la Kenta. Depuis des générations, l’oasis nourrit les humains qui y vivent. Une culture étagée « C’est simple, s’il y a une oasis, il y a de l’eau, et s’il y a de l’eau, il y a culture, explique Haman, agriculteur dans la palmeraie de Tozeur. L’oasis traditionnelle présente une culture étagée en trois strates : palmiers, arbres fruitiers et culture maraîchère. L’organisation agricole centrée sur une utilisation raisonnable de l’eau permet une production vivrière importante. » Âgé de 55 ans, Haman grimpe pieds nus au sommet des palmiers-dattiers depuis 44 ans. Aussi bien pour la cueillette des dattes que pour la pollinisation manuelle et l’entretien annuel de cette herbe géante pouvant atteindre 30 mètres de haut. « Le palmier-dattier n’est pas un arbre », précise Haman en montrant du doigt le tronc, qui n’est d’ailleurs pas un tronc, mais un stipe. « La pollinisation consiste à extraire le pollen des palmiers mâles pour le poser sur les régimes des palmiers femelles. Elle se fait par introduction à l’envers des épillets mâles dans l’inflorescence femelle après éclatement des spathes. Un mâle peut fertiliser quelque 200 femelles, et même plus, d’où la prédominance des palmiers femelles dans les oasis. » Au printemps, les premières dattes apparaissent en grappes à la base des feuilles de palmiers-dattiers. Elles sont noires ou vertes. L’été, les fruits atteignent leur taille définitive, se colorent de jaune et prennent leur saveur sucrée. Des sacs sont attachés autour des grappes pour les protéger de la pluie et des insectes et pour éviter que les fruits ne tombent au sol. Lors de la récolte, l’effervescence bat son plein dans la palmeraie. Les cueilleurs grimpent dans les palmiers, libèrent les régimes de dattes de leur sac de plastique, sélectionnent les hampes sur lesquelles pendent les régimes qui seront libérés de leur longue tige et suspendus à une poutre. Commence alors un premier tri. On enlève une à une les dattes de moindre qualité pour ne garder que les meilleures. Plus le tri est sélectif à la base, plus le travail de sélection et de conditionnement à l’usine sera facile. Un dattier contient en moyenne 14 à 15 régimes de dattes. Le palmier-dattier est une plante géante rentable, souligne Haman. « Il sert à une infinité de choses. À la production de dattes, mais aussi au jus de palmier. Ses palmes sont utilisées dans la construction des toits de maisons, dans la fabrication de balais, d’éventails, de chapeaux et de paniers. Elles servent de brise-vent pour se protéger de l’envahissement du sable. Quant au stipe solide et résistant, on en fait des portes décoratives propres à l’architecture traditionnelle de la Tunisie. » Tozeur au rythme lent Changement de décor en entrant dans la vieille ville de Tozeur. Ici, pas de souk tonnant et étourdissant. Le rythme lent de la médina laisse le temps de musarder sans brimades des vendeurs. Le commerce est fait de regards, de sourires, de poignées de mains, d’échanges et de complicité. La disposition géométrique des briques en terre séchée des façades des maisons du vieux quartier Ouled-el-Hadef est remarquable. Le montage suit un dispositif favorisant la maîtrise des températures, une démarche écologique essentielle sous ces latitudes où le mercure peut atteindre 50 °C. Quant aux motifs ornementaux, ils sont inspirés des tapis et de la calligraphie. Sur une placette nimbée de lumière d’or, à l’ombre d’arcades, le Musée des arts et traditions populaires, aménagé dans un ancien marabout, suscite la curiosité. Nous sommes accueillis par Souad, l’unique préposée qui nous présente son musée avec beaucoup de rigueur et une touche d’ironie. Sans prétention, la maison s’organise autour de plusieurs thèmes de la vie au quotidien des gens du désert : vestiges romains, poteries, tapis, couvertures, textes anciens, masques africains, costumes, bijoux, objets usuels et portes arborant différents heurtoirs. À l’étage, un métier à tisser rappelle la vivacité de l’artisanat du tapis « tozeur » de type « kilim », tissé à la main selon des coutumes anciennes héritées des artisanes locales. Souad nous entretient longuement de l’origine des lieux, de la division traditionnelle des pièces et des coutumes diverses. Elle partage sa poésie, chante comme alouette, offre thé et dattes. « La datte n’est pas que nourriture, c’est un remède, explique Mohamed, notre guide. Riche en fer, phosphore, magnésium, lutéine, zéaxanthine, potassium et fibres, elle traite l’anémie, est excellente pour le cerveau, réduit l’hypertension, améliore la vue, diminue les risques d’AVC et élimine les toxines du corps. Et c’est une solution de remplacement au poison [sucre] blanc. » Au café culturel Hoch el-Abbes, le propriétaire Mondher el-Abbes nous parle d’histoire et de traditions culturelles et culinaires en Tunisie. Alors que nous dégustons thé à la menthe et ghraiba à la farine de pois chiches — une pâtisserie ancestrale —, l’homme sort son oud et nous joue un air de l’oudiste et compositeur tunisien Anouar Brahem. Mondher offre des cours de musique à qui souhaite vivre Tozeur en mode slow travel. Article publié dans le Devoir du 21 novembre 2015

  • Tunisie - Symphonie en bleu

    Virée à travers trente siècles d'histoire et toujours ces tons de bleu magnifique peu importe où l'on se trouve dans ce pays, attachant comme pas possible tant par son histoire que son hospitalité. De la côte au désert via les vallées profondes toujours ce bleu bon pour le moral. Du nord au sud et d'est en ouest, des rives de la Méditerranée aux portes du désert, des milliers de paysages et un nombre surprenant de sites archéologiques. Et encore du bleu. La Tunisie se parcourt en train, à pied, en bus, en auto... ...et à dos de dromadaire Et ce peuple accueillant Partout dans les jardins, les vignobles, dans les hôtels, les restos et les sites archéologiques... . À très bientôt jolie Tunisie. En attendant rien n'empêche de rêver.

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