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  • Photo du rédacteurHélène Clément

Boston sur le mode «slow travel»



Le Mémorial de l’Holocauste à Boston, Massachusetts, États-Unis. Il est dédié au peuple juif qui a été tué par l’Allemagne nazie pendant l’Holocauste.

C’est à pied qu’il faut sillonner Boston. Sur le mode slow travel pour en capter la saveur. La capitale du Massachusetts a bien des choses à raconter. Et à savourer aussi. La Freedom Trail, d’une longueur de quatre kilomètres, semble toute désignée pour cette découverte. De Faneuil Hall à Copp’s Hill Burying Ground, un voyage historique à saveur italienne dans les rues du plus vieux quartier d’une ville un chouïa bon chic bon genre : le North End.​


Oui, on peut dire de bon ton, Boston. Et dans la pure tradition bourgeoise. Est-ce dû à son héritage puritain, ou tout bonnement à une petite prétention découlant de ses fameuses alma mater comme le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et l’Université Harvard ?


Des grandes écoles si importantes qu’au moins un quart des résidants de Cambridge appartiendrait à la classe étudiante. Quant aux tontines générées par les fameuses académies, elles figurent au palmarès des plus respectables de l’État. Et puis, la métropole économique de la Nouvelle-Angleterre porte aussi en ses murs 400 ans d’histoire.


La ville de Boston a vu se dessiner les révolutions qui ont marqué l’histoire du Nouveau Monde, naître les États-Unis d’Amérique et grandir les premiers intellectuels du pays.

Et combien de trouvailles ingénieuses tirent leur origine dans cette cité ? On pense entre autres à la construction de la première locomotive, du premier métro, de la première école afro-américaine et de la première bibliothèque publique du pays. À l’invention de l’ordinateur aussi. Et de la machine à coudre, du téléphone et du plus prestigieux marathon de course au monde…


Oui, de bon ton, Boston. Captivante également. Et aussi belle au soleil que lorsqu’il brumasse, pleuviote ou neigeote. À la brunante, des réverbères à gaz éclairent les ruelles du coeur de la ville. Tout à fait joli ! Et à l’approche de Noël, arbres et bâtiments sont de même bellement illuminés.


Ce qui ne fut pas toujours le cas. Car Noël, au temps des puritains, n’avait pas la cote dans l’« Athènes d’Amérique ». Les ascètes en avaient interdit en 1659 toutes les célébrations. Aux yeux de ces moralistes sévères, Noël n’apportait que désordre et perdition. Donc, interdit de musiques, de danses, de bains de foule. Ces bégueules vivaient dans une peur insipide du plaisir.


Au final, si l’austère courant calviniste — légué à la capitale du Massachusetts par John Winthrop, fondateur de Boston en 1630 — contribue toujours à sa réputation de ville puritaine, il ne reste du puritanisme que le ragoût irlandais en conserve Puritan, en vente dans les épiceries.


Little Italy


Au coeur de la ville, à l’ouest du grouillant quartier des finances, s’éploie un immense parc où viennent flâner, jogger et casser la croûte gens d’affaires, Bostoniens de bonne famille et touristes avertis. Premier parc public au pays, le Boston Common a été créé en 1634 pour permettre aux Bostoniens de faire paître leur bétail. Les ruminants y ont ruminé jusqu’en 1830. Puis, il a servi de terrain d’exercice militaire et de lieu d’exécution des sorcières sous les puritains.


De là commence la Freedom Trail. Le circuit de quatre kilomètres, balisé d’une ligne de briques rouges au sol, relie 17 bâtiments et sites historiques qui racontent la naissance du pays, de l’arrivée des puritains sur la péninsule Shawmut jusqu’à la fin des travaux du fameux Big Dig.


La randonnée urbaine sillonne le quartier des affaires, traverse Faneuil Hall, s’infiltre dans les ruelles de Blackstone Block, parcourt le quartier North End et finit sa course à Charlestown. Qui plus est, on oublie, à l’ombre des gratte-ciel, que Boston est une ville côtière fondée sur une presqu’île. À moins d’accéder au zénith d’une tour moderne, ce n’est qu’une fois sorti du labyrinthe des rues étroites du quartier financier, dans le quartier North End, qu’on voit la mer.


Jusqu’au milieu du XIXe siècle, le port de Boston était le plus important d’Amérique du Nord. Autrefois, les navires déversaient sur les quais du Waterfront porcelaine de Chine, soie indienne et vêtements parisiens. Un commerce maritime international qui a fortement contribué à raffiner crescendo cette société un chouïa beau chic beau genre aux origines collet monté.


Ces bateaux transportaient aussi des immigrants qui fuyaient maladie et famine en Europe. D’abord les Irlandais, puis les Juifs et les Italiens. Ils s’installèrent surtout dans le North End. Aujourd’hui, seuls les Italiens occupent encore ce très coloré quartier baptisé Little Italy.



Dans les vapeurs de North End


Il brumassait ce matin-là dans le North End. Dans les ruelles étroites et pavées de Blackstone Block — le plus vieux quartier commercial de Boston —, des fumerolles s’échappent des égouts. Une série de bâtiments en brique rouge borde les venelles. On dirait le Londres de Charles Dickens.


Il est 10 h 25 lorsque nous prenons place au bar à huîtres de l’Union Oyster House. Il n’y a plus une place de libre autour du comptoir en acajou. On vient de loin pour y déguster l’ostracée pêchée dans les eaux de Cape Cod. Et voir le plus ancien restaurant de la ville, fondé en 1826 et jadis fréquenté par le clan Kennedy : John F. y avait sa table, la 18, au deuxième étage.


Le bâtiment qui abrite le restaurant est aussi l’un des plus anciens édifices de la Boston. En 1796, Louis-Philippe, le futur roi de France qui y était en exil, habitait l’étage supérieur. On raconte qu’il donnait des cours de français aux Bostoniens de bonne famille pour payer son loyer.


Nous dégustons deux douzaines d’huîtres Cotuit arrosées d’un verre de vin blanc. La Freedom Trail n’est pas qu’histoire, il est gourmand aussi. La Petite Italie compte une centaine de restaurants, des épiceries fines, des pâtisseries et des cafés. Et les vendredis s’y tient depuis 200 ans un immense marché public de fruits, légumes, viandes, poissons et babioles, le Haymarket.


« Les Italiens n’ont pas fait table rase de leur passé, explique Michele Topor, responsable du Boston Food Tour. Venus pour la plupart de Sicile, Calabre et Naples, ils ont adapté à la réalité bostonnaise les bagages culturels dont ils sont porteurs. Chaleureux et généreux, ils partagent avec plaisir coutumes et recettes. Leurs enfants ont fréquenté les écoles du quartier, reprennent souvent leurs commerces et continuent de vivre près de la famille. »


Dans le North End, les entrepôts ont été transformés en condos, les commerçants prennent le temps de raconter l’Italie de leur enfance aux visiteurs de passage, il y a des files devant les restaurants, les gelatarias et les pâtisseries, et les bonnes odeurs s’échappent de toutes les cuisines.


Le Daily Catch, un restaurant pas plus grand qu’une boîte à chaussures, attire les foules. La familia Freddura cuisine les pâtes aglio olia et les calamars en sauce marinara depuis quatre générations. Les spaghettis arrivent sur la table dans la poêle à frire. Les Bostonnais feront la queue pendant des lustres pour les pâtes fraîches à l’encre de calmar et le homard Fra Diavolo de Paul et Maria.


Quant aux cannolis — des rouleaux siciliens en pâte frite, fourrés d’une farce à base de ricotta — il fallait choisir les meilleurs entre Modern Family, Mike’s Pasty ou Maria’s Pastry Shop. OOOOH, un choix difficile ! Nous optons pour ceux de Maria : une pâte croustillante et un mélange parfait de ricotta, de crème pâtissière et de crème fouettée. Surtout, ne pas paniquer si vous entendez crier dans la cuisine. Maria est plutôt difficile sur la qualité de ses ingrédients.


Cannoli de chez Mike's Pastry, Petite Italie, Boston

Petites maisons briquetées avec escalier en métal noir sur le côté ; linge qui sèche entre deux immeubles ; ruelles animées, odeurs de bouffe et bonne humeur à l’italienne transportent le visiteur en Sicile le temps de quelques heures. On en perd le fil d’Ariane de la Freedom Trail.


Mais North End n’est pas que la Petite Italie, c’est aussi un haut lieu de l’Indépendance américaine. C’est de la jolie église de style géorgien Old North Church que le patriote Paul Revere a entrepris sa chevauchée nocturne après avoir été prévenu de l’arrivée des Britanniques, en 1775. Les deux lanternes allumées dans le clocher annonçaient que l’ennemi venait de la mer.




Ce qui frappe quand on entre dans l’église, ce sont les bancs d’origine nichés dans de petites cases fermées. À l’époque, chaque famille devait acheter son propre compartiment pour assister aux célébrations. Malgré les batailles et les ouragans, l’intérieur est bien conservé.


Derrière la boutique, un jardin urbain délimité par des murs de briques invite au recueillement.

En cette fin de journée sombre et pluvieuse, les six tours en verre du New England Holocaust Memorial, situées dans le Carmen Park, non loin de l’Old State House et du Faneuil Hall, sont magnifiquement illuminées. L’oeuvre de l’architecte Stanley Saintowits représente six des principaux camps d’extermination. Une fumée connotant les chambres à gaz s’échappe du sol, plongeant le promeneur dans une ambiance glauque à fond. Un rappel de la bêtise humaine !


Bon, l’hôtel Omni Parker House semble tout indiqué pour aller s’empiffrer d’un gros morceau de Boston Cream Pie. Retour à la source. C’est ici, dans le plus vieil hôtel en activité continue aux États-Unis, qu’a été inventé en 1856 le fameux gâteau composé d’une génoise et fourré à tire-larigot de crème pâtissière. Faits intéressants : le leader vietnamien Ho Chi Minh y aurait été jadis pâtissier. Et Malcom X, plongeur lors de l’attaque de Pearl Harbor en 1942…




EN VRAC


Dormir Pour la vue sur le fort Point Channel, le Children’s Museum et le Boston Tea Party Ships Museum : à l’InterContinental Boston. Et aussi pour le plaisir de jogger le matin à 6h le long de l’Harbour Walk. Cet hôtel de luxe, aux formes architecturales audacieuses, est très tendance. Chaque bar tient une vaste collection d’alcools. Son restaurant principal porte le nom suave de Miel, référant aux 40 ruches qui ornent son toit et « pollinisent » le Tout-Boston.

Pour l’histoire À l’Omni Parker House. Difficile de ne pas craquer pour cet hôtel élégant qui rappelle la Vieille Europe. C’est ici, à la table 40 de la chic salle à dîner, que John F. Kennedy a demandé Jacqueline Bouvier en mariage. La Boston Cream Pie y a été inventée, et le grand miroir dans lequel Charles Dickens a répété les mimiques des personnages de son célèbre Chant de Noël est encore suspendu aux murs.

Déguster Des cannolis (mariaspastry.com ou mikespastry.com ; un bon café (modernpastry.com) ; de bonnes pâtes (thedailycatch.com) ; et de bonnes huîtres (unionoysterhouse.com).

À faire Arpenter le quartier de la Petite-Italie, dans le North End, en compagnie de Michele Topor, auteure du Boston Food Tours. Elle connaît comme le fond de sa poche l’histoire de Little Italy, ses épiceries, ses pâtisseries, ses restaurants. Le quartier au grand complet connaît bien Michele puisqu’elle y guide des groupes depuis 20 ans. Patiner sur la patinoire réfrigérée du Frog Pond, dans le Boston Common. Visiter la maison en bois de Paul Revere. Datant de 1680, c’est la seule survivante d’une architecture d’inspiration médiévale. paulreverehouse.org. Durant les Fêtes, emmener les enfants tourner sur des airs de Noël au carrousel Greenway.

Lire Le guide Ulysse Boston, une bible indispensable sur cette belle ville, qui en raconte l’histoire et offre de bons conseils aux voyageurs. Tout y est, ou presque !

Se procurer La carte et le guide complet de la Freedom Trail au Visitor Information Center du Boston Common, 139 Tremont Street ou au Faneuil Hall Square.

Renseignements supplémentaires Tourisme Massachusetts, massvacation.ca; Tourisme Boston, cityofboston.gov/visitors.




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