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Photo du rédacteurHélène Clément

Quatre milliards d’années en quelques heures à Sherbrooke

Ça brasse au Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke. Tremblements de terre, séparation des continents, déglaciation, volcans… On a parfois chaud, parfois froid, parfois le vertige. Puis il y a ces animaux du monde qui nous épient. Et ces fragments d’humanité qui relatent 12 000 ans d’histoire. Cap vers le Vieux-Sherbrooke !


Le spectacle «Terra mutantès» permet de connaître les origines du relief appalachien, assis autour d’une table interactive qui s’anime au rythme du déplacement des océans, de volcans qui crachent le feu, de glaciers qui avancent en écorchant les montagnes...

Article publié dans le quotidien Le Devoir du 23 février 2018


Situé au bord de la bouillonnante rivière Magog, sur le site de l’ancienne usine américaine de lingerie féminine Julius Kayser — qui a fait travailler des milliers de Sherbrookois entre 1915 et 1988, ce musée raconte l’histoire de la formation de la Terre, celle des Cantons-de-l’Est surgis de la glace il y a 12 000 ans, ainsi que sa propre histoire.


Un musée né en 1879 au séminaire de Sherbrooke, situé sur la rue Frontenac, juste en face, à une époque où les collèges classiques se constituaient des collections de spécimens qui servaient à l’enseignement des sciences naturelles.


De grands panneaux dans le hall d’entrée racontent que c’est le chanoine Léon Marcotte qui, pendant 64 ans, bichonnera cette collection. Qu’à sa mort, en 1964, le Musée du séminaire fermera ses portes pour ne rouvrir qu’en 1973. Puis, modernité oblige, le Musée déménagera dans l’ancienne usine Julius Kayser, alors en pleine revitalisation de ses espaces pour devenir en 2002 le Musée de la nature et des sciences que l’on connaît aujourd’hui.


AlterAnima


C’est de façon fantaisiste et sans rien perdre en rigueur scientifique que l’exposition AlterAnima présente quelque 500 spécimens d’animaux naturalisés — chacun ayant sa petite histoire originale — sur les 65 000 qu’héberge la réserve du musée.


L’histoire de l’orignal fait sourire. En 1925, le chanoine Léon Marcotte aurait donné 100 $ pour le faire empailler. La taxidermie de l’animal aurait été réalisée à l’intérieur du Musée du séminaire. Puis il a fallu le déménager en 2002.


« On a dû percer un trou dans le mur de l’ancien Musée du séminaire et faire appel à une grue pour le descendre en bas de l’édifice », explique Mitch, un employé.

Plutôt que par espèces ou par habitats naturels, les animaux, coquillages et insectes sont présentés par clans. Clan des beaux becs, des queues originales, des têtes dures, des noirs et blancs, des étranges formes…


Les anecdotes sont racontées par trois guides virtuels au moyen d’une tablette électronique : un biologiste passionné, une écologiste mordue et un veilleur de nuit captivant. On en perd le nord. Et la notion du temps !


Informations approfondies, jeux de « cherche et trouve » et parcours de visite se retrouvent sur cette petite tablette prêtée aux visiteurs au moment de l’achat du billet.


Fragments d’humanité


Plus classique dans sa forme, la nouvelle exposition Fragments d’humanité. Archéologie du Québec présente jusqu’en mai prochain 200 pièces issues de fouilles archéologiques réalisées sur plus de 10 000 sites répartis au Québec.


Réalisée par le musée Pointe-à-Callière, cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, cette exposition, qui célèbre 50 ans de recherches et de découvertes en archéologie québécoise, plonge le visiteur dans les us et coutumes d’époques qui remontent jusqu’à 12 000 ans, alors que le territoire québécois émergeait tout juste des glaces.


Vases, pointes de harpons, guimbardes en laiton, garnitures de fusils, fragments d’épaves de bateaux… L’exposition comprend quatre zones : archéologie préhistorique, terres d’échanges et de commerce, chronique du quotidien et histoires englouties.


Intrigante, la petite collection de pipes. Fumer la pipe fait partie des rituels amérindiens depuis 3000 ans, lit-on sur une affichette. Ils fument la pipe pour bien disposer les esprits avant les échanges ou pour favoriser la guérison.


Terra mutantès


Terra mutantès traverse 400 millions d’années en 20 minutes. L’histoire merveilleusement bien contée catapulte le spectateur au coeur de la formation géologique des Appalaches. D’entrée de jeu, la curiosité est attisée, le spectacle s’annonce grisant.


« Préparez-vous à un voyage extrême qui donne le vertige, déclare d’une voix musclée le narrateur Guy Nadon. Vous allez traverser des milliers d’années interminables. La terre tremblera, la lave coulera, les fonds marins cracheront le feu. »


C’est assis sur des bancs autour d’une large table interactive qui s’anime au rythme du déplacement des océans, de volcans qui crachent le feu, de glaciers qui avancent en écorchant les montagnes, que l’on s’instruit sur les origines du relief appalachien.


Les images défilent sur trois écrans et se reflètent sur la table dont la surface brandille au toucher grâce à des caméras infrarouges.


Le visiteur peut interagir et tenter d’attraper un poisson sans mâchoire qui défile à toute allure, provoquer des mécanismes d’érosion et vivre une tempête de neige dont les flocons virevoltent dans toute la pièce.


On ressort ébloui de cette expérience, avec en tête cette phrase de Guy Nadon : « La colère provoque de belles choses. » Une référence, entre autres, aux paysages estriens.


Avant de quitter le musée de la rue Frontenac, cap vers le simulateur de tremblements de terre pour vivre trois secousses de magnitudes différentes sur l’échelle de Richter. Terre qui ondule, bruits sourds, silence. Ça doit être affolant dans la vraie vie !

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